La
plupart de nos hommes politiques nous vantent l'immigration comme
le remède miracle à notre dénatalité.
Il faut, semble-t-il, y regarder de plus près.
L'actualiténous
donne un exemple d'immigration qui est en effet une aubaine pour
le pays d'accueil : c'est la R.F.A. recevant des dizaines de milliers
de jeunes Allemands de R.D.A. Même origine, même langue.
même culture, personnes jeunes, capables, ayant une formation
professionnelle, etc., venant remplir les vides creusés
par la dénatalité déja ancienne en R.F.A.
dans les générations des nouveaux actifs.
Le
XIXe siècle a été pour la France un désastre
démographique immense puisque par rapport à l'Angleterre,
elle a perdu 80 % de son importance démographique, et la
chute a été presqu'aussi importante par rapport
aux autres pays d'Europe. Sans l'immigration d'origine européenne
la chute aurait été encore plus profonde. Cette
immigration a donc été très utile.
Ces
deux exemples favorables ne doivent pas occulter le problème
général. Notre objectif n'est pas ici de l'aborder,
mais d'étudier seulement un aspect les rapports de l'Immigration
(lM) et du Vieillissement de la Population (VP).
Les
rapports du VP et de la dénatalité sont bien connus
maintenant, cette dernière ayant un rôle déterminant
dans le VP Ceux du VP et de l'lM le sont moins.
En
raison de l'extrême importance du VP en France (et dans
l'Ouest européen) et de sa très forte accentuation
prévisible de fayon absolument certaine dans les très
prochaines decennies (moins de 20 ans), il est essentiel d'examiner
l'incidence de l'lM sur le VP.
Le
VP est l'augmentation de l'âge moyen de la population entre
deux dates successives, ou, selon une autre définition,
l'augmentation de la proportion de la population âgée
(60 ans et plus) par rapport à la population totale (que
nous appellerons rapport 1) mais aussi par rapport à la
population adulte (20 à 60 ans) (rapport 2) par rapport
à la population jeune (0 à 20 ans) (rapport 3).
L'étude
de ces rapports, avec rappel du rôle de la natalité
sur eux, est essentielle pour la compréhension des mécanismes
en cause, mais nous entrainerait trop loin (1).
L'action
respective de la natalité et de l'lM sur l'âge moyen
nous fera cependant comprendre l'essentiel.
L'âge
moyen est obtenu par division de la somme des âges de chacune
des personnes d'une collectivité par leur nombre. Sa variation
détecte l'existence d'un vieillissement (VP) (augmentation
de l'âge moyen) ou d'un rajeunissement (abaissement de l'âge
moyen). Et elle en mesure l'intensité et l'évolution.
RÔLES
RESPECTIFS DE LA NATALITÉ ET DE L'IMMIGRATION SUR L'ÂGE
MOYEN MOYENS DE CORRECTION DU VP
Quand,
dans une collectivité donnée, vous ajoutez un individu
(une unité) dont l'âge est supérieur à
l'âge moyen, vous augmentez l'âge moyen de cette collectivité,
donc vous la vieillissez et d'autant plus que l'âge de l'individu
ajouté est plus élevé.
Quand
vous lui ajoutez un individu d'âge inférieur à
l'âge moyen vous abaissez cet âge moyen, donc
vous la rajeunissez et d'autant plus que l'âge de cet individu
est plus faible.
Il
est évident que ce qui la rajeunit le plus, c'est une naissance,
puisqu'au départ, elle a zéro jour.
L'augmentation
de la natalité a donc un effet puissant de rajeunissement
et cet effet est immédiat et durable. Pour fixer les idées
et schématiser, si l'augmentation de natalité se
produit par exemple brusquement sur une année et si l'âge
moyen est de 34 ans, l'effet de rajeunissement se produit tout
de suite dès la hausse et dure 34 ans moins une très
faible fraction d'année. Si l'on supposait que tous les
enfants nouveaux arrivaient dans une population a l'âge
de un an, leur effet de rajeunis-sement durerait 34 - 1 = 33 ans.
En
outre, l'augmentation de natalité a un second effet 20
ans après son début : les enfants de cette natalité
augmentée arrivant à leur tour à l'âge
de la procréation et si celle-ci n'était pas retardée
ni diminuée (comme aujourd'hui), il y aurait 20 ans après
la 1ère vague d'augmentation de natalité et de rajeunissement,
une 2ème vague d'augmentation de natalité donc une
2ème vague de rajeunissement, qui amplifient et prolongent
les effets de la 1èreet prennent le relais.
L'immigration
a un rôle différent. Si tous les immigrés
avaient par exemple 10 ans et arrivaient en une fois, leur effet
de rajeunissement durerait 34 - 10 = 24 ans.
S'ils arrivaient tous en une fois, à l'âge de 20
ans, leur effet de rajeunissement durerait 34 -20 = 14 ans.
L'effet
de rajeunissement diminue en intensité et en durée
au fur et à mesure que l'âge des immigrés
augmente.
Dans
un but de rajeunissement, on peut parfaitement concevoir (et accepter)
une immigration jeune, mais en sachant que l'intensité
de son effet et sa durée seront d'autant plus importants
qu'elle est plus jeune et d'autant moins qu'elle est plus âgée
et se rapproche de l'âge moyen de la population receveuse.
Pour
fixer les idées : un seul enfant de un an a une action
de rajeunissement équivalente à celle de 11 immigrés
de 31 ans, si l'âge moyen est de 34 ans, Et en outre, cet
enfant de un an exercera son action de rajeunissement pendant
33 ans (34 - 1), alors que les 11 immigrants exerceront la leur
pendant 3 ans seulement. Donc elle est 11 fois plus forte et 11
fois plus durable.
Et
au-delà des 3 ans, les 11 immigrants passeront au-dessus
de l'âge moyen et dès ce moment vieilliront la population...
Alors que l'enfant né par exemple au temps T ne passera
au-dessus de l'âge moyen que 34 ans plus tard c'est-a-dire
au temps T + 34.
Si
l'immigrant est dès son arrivée au-dessus de l'Age
moyen, il vieillit d'emblée la populallon receveuse : ces
données sont essentielles.
Tout
ceci veut dire
1)
que pour corriger le VP, qu'il soit dû à la diminution
de la population jeune (par dénatalité) ou à
l'augmentation de la population âgée ou aux deux
à la fois, dans les 3 cas il y a 2 moyens l'augmentation
de ia natalité l'immigration jeune, mais que des
deux le moyen le plus important et de loin est l'augmentation
de la natalité.
2)
que l'immigration n'est pas quelle qu'elle soit un moyen de correction
du VP, que l'âge des immigrants est déterminant et
qu'elle peut dans certaines conditions (immigrants au-dessus de
l'âge moyen) aggraver le VP,
CONCLUSION
Il
faut replacer ces faits dans le contexte démographique
français actuel qui comporte un VP élevé
s'accroissant régulièrement jusqu'en 2006, pour
à partir de cette date exploser littéralement jusqu'en
2033. En effet, le chiffre des 60 ans et plus passe de 10 270
000 (INSEE) en 1987 à 12 000 000 en 2006
(+ 1 800 000 en 19 ans) et il passe de 12 à 16 millions
de 2006 à 2020 et de 16 à 20 millions de 2020 à
2033 (soit 8 millions en 27 ans). Donc très forte accentuation
à partir de 2006 due à l'arrivée en 2006
a l'âge de 60 ans des grandes générations
nées de 1946 à 1973 dont l'effectif est d'environ
30 % supérieur à celui des 15 générations
antérieures (1946 + 60 = 2006 - 1973 + 60 = 2033). Il y
a actuellement un 60 ans et plus pour 2,1 adultes en actilvité
ayant un emploi ; avec ces faits on arrive à deux 60 ans
et plus (doublement) pour 2,1 adultes en activité si la
population adulte occupée reste stable (et en état
de sous-compétitivité, l'augmentation de l'emploi
est difficile et on peut par contre perdre des emplois). Ceci
entraîne un doublement des charges de retraite et de frais
médico-pharmaceutiques vieillesse pour les adultes au travail
et les entreprises. D'où augmentation fort importante des
prélèvements obligatoires, déjà très
supérieurs avant elle à ceux de pratiquement tous
les concurrents. Ceci est désastreux pour la compétitivité
et une telle perspective est économiquement insupportable.
On
peut certes atténuer les conséquences par un fort
recul de l'âge de la retraite, mais ceci exige une augmentation
de la création d'emplois encore plus forte que sans (correspondant
à l'effectif des générations de 60 ans et
+ maintenues en activité et occupant des emplois non libérés
pour les plus jeunes), ce qui précisément exige
une très grande compétitivité que précisément
on n'a pas.
La
solution (car il y en a une) est la grande politique démographico-économique
explicitée ailleurs à mettre en uvre dès
maintenant. Le pouvoir fait la sourde oreille et écarte
les solutions pour des raisons mystèrieuses, au moins faut-iI
ne pas aggraver la situation, c'est l'évidence.
Les
immigrants nés entre 1946 et 1973 augmentention vague de
vieillissement de 2006 - 2033.
S'est-on
préoccupé de la question dans les calculs du V de
cette période? Et s'en préoccupe-t-on aujourd'hui
pour tous les immigrants qu'on continue à accueillir ?
Alors,
il faut prendre conscience de ce point apparemment méconnu
notamment par le pouvoir, vérifier très soigneusement
l'âge des immigrés, éviter les générations
nées entre 1946 et 1973 qui agravent le V, ne plus accepter
si l'on y tient qu une immigration jeune née après
1973. Nous ne parlons pas ici des autres problèmes de l'lM
(ce n'est pas le sujet).
Si,
refusant la prise en compte de ce fait décisif, et même
son étude pour vérifier dans quelle proportion la
vague du VP 2006 - 2033 va en être augmentée, alors
il faut en tirer les conséquences et s'apprêter à
un effort économique beaucoup plus important encore que
celui déjàà l'horizon et qui apparaîÎt
déja aux limites extrêmes du supportable pour être
optimiste et ne pas dire plus.
(1)
Elle se trouve dans une étude plus détaillée
de E. TREMBLAY
E.
Tremblay
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, décembre 1989
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