La
définition de l'embryon "être humain potentiel"
proposée avec insistance par le Comité National
d'Éthique et reprise par Jean Potin dans son êditorial
à propos du film "Le Cri Silencieux" (La Croix
du 26 octobre) est-elle judicieuse, ambigue ou simplement un leurre
rassurant destiné à justifier les pires comportements,
ainsi que certains le pensent ?
Scientifiquement
pariant, ce qui est potentiel n'existe pas encore mais va se transformer
par étapes successives pour en arriver à son état
définitif, ou en biologie, à son être. Prenons
tout d'abord quelques exemples simples : un potentiel électrique,
comme le 220 volts à une prise de courant, n'est encore
ni lumière ni chaleur ni force, mais il peut le devenir
selon les intentions de l'utilisateur. De son côté
le schéma, sur plan détaillé, de la fabrication
d'une bombe atomique contient bien un potentiel redoutable mais,
heureusement, n'en possede pas encore les propriétés
qui ne seront bien sur explosives qu'après la réalisation.
Revenons
donc à l'embryon en commençant par préciser
qu'au-delà du 15ème jour les cellules jusqu'alors
indifférenciées, commencent à se spécialiser;
il s'en suit qu'il est acceptable de dire que l'embryon évolue
vers le ftus. Ensuite nous rejetterons d'emblée la
présentation de deux termes accolés "humain"
et "potentiel", servant à le déf-nir,
car cela nuit à la rigueur du raisonnement. En effet est-il
concevable qu'un être soit à la fois humain et en
même temps un futur humain ? Comment, simultanément,
peut-on être ou ne pas être ? Cette présentation
n'est d'ailleurs pas sans analogie avec le texte de la loi Veil
qui autorise l'avortement après avoir proclamé en
son article 1er : « La loi garantit le respect de
tout être humain dès le commencement de la vie. Il
ne saurait être porté atteint à ce principe
qu'en cas de nécessité (!) et selon les conditions
définies par la présenté loi. »
Examinons
maintenant le terme "être potentiel", qui par
définition implique :
qu'il ne s'agit pas d'un être ayant les caractéristiques
d'un homme
qu'il deviendra humain puisqu'il dispose effectivement
d'un programme contenu intégralement dans le génome
du zygote (cellule) issue de la fécondation de l'ovule
par le spermatozoide
qu'il deviendra humain par étapes successives. Restera
alors à définir à partir de quelle étape
il sera officiellement considéré comme pleinement
humain. Serait-ce quand il aura acquis le mouvement quand ses
réflexes joueront ? quand il percevra les sons ? puis la
douleur ? quand il respirera l'air ambiant ? quand il parlera
? Et qui, quelle autorité va fixer cette norme ? Le médecin,
le moraliste, le linguiste ?.
Et
quelle place laissera-t-on à l'AME, déjà
définie présente dès l'origine, comme esprit
par Aristote et çomme substance spirituelle et immortelle
par l'Église primitive ?
Qui
plus est, en se limitant à la notion d'être potentiel
rien, moralement, ne s'oppose à la modification ou à
l'interruption du programme et ceci ouvre la voie légale
à toutes les experimentations et à toutes les destructions
d'embryons et de ftus en vue de l'utilisation de leurs tissus
à des fins médicales, pharmaceutiques ou... cosmétiques.
Il n'est pas inutile de rappeler à ce sujet que les cellules
se groupent en "tissus" eux-même se groupent en
"organes" (foie, thymus, cerveau...), en peau et en
éléments intermédiaires.
Pour
toutes ces raisons, l'expression "Etre humain potentiel"
nous parait inacceptable et doit être modifiée en
"Etre humain avec potentiel" (1). Etre humain qui, par
conséquent, a droit à la vie sans aucune restriction
et qui ne peut faire l'objet de manipulations expérimentales
ou d'exploitation. La Charte des droits de la famille en son article
IV, publiée par le Saint Siège fin 1983 le proclame
d'ailleurs sans ambiguité. Enfin être humain doté
d'un potentiel qui ne cessera de se développer depuis les
tous premiers moments jusqu'à l'adoles-cence, voire jusqu'à
l'âge adulte.
(1)
Vocable propose par L'Episcopat de Grande-Bretagne en réponse
à un rapport parlementaire sur l'utilisation des embryons.
Guy
d'Arcier
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, juillet 1986
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