Jusqu'alors
la coutume voulait que la société et la médecine
s'immiscent le moins possible dans cette liberté des libertés
qui est la décision d'un couple d'avoir ou non un enfant.
Mais
voilà, cet acte, habituellement décidé et
acompli de concert par un homme et une femme, conduit à
son terme par l'associa-tion de l'embryon avec cette femme, peut
aujourd'hui ne plus être décidé ENSEMBLE et
EN MEME TEMPS.
Des
TIERS interviennent : donneurs de sperme et d'ovocytes, femme
qui prête son utérus, fécondation extra-corporelle.
Ainsi
maintenant les progrès de la science et de la médecine
sont tels que toute personne peut croire, en toute condition,
à la possibilité d'avoir un enfant.
C'est
théoriquement vrai, mais très vite, se dresse la
question de l'intérêt de l'enfant d'une part, des
aspects juridiques des nouvelles méthodes de procréation
de l'autre.
Au
plan éthique on se rend compte, très vite, qu'en
dissociant parenté biologique d'un côté, affective
et éducative de l'autre, on brouille les cartes, et l'intérêt
de l'enfant n'est plus le premier en vue...
A
propos des nouveaux modes de procréation seront successivement
envisagés :
La Fécondation in-vitro,
l'Insémination artificielle avec donneur,
les mères de substitution.
a)
La Fecondation in-vitro
Quelle
étonnante prouesse scientifique inaugurée en Grande-Bretagne
en 1978 puis réalisée en France à .l'hôpital
Antoine Beclère de Clamart, avec la naissance de la petite
Amandine le 27février 1981 ! Sans doute cette belle réussite
est à mettre à la clef des chercheurs et des médecins.
Mais
il faut bien savoir :
1) Qu'elle implique une sélection délibérée
des embryons, certains seront implantés, d'autres utilisés
pour l'expérimentation afin d'améliorer le taux
de mortalité de 90 % (10 % seulement des essais étant
réussis).
On pense qu'en matière de procréation naturelle
la mortalité ne dépasse pas 20 %.
2)
Le coût énorme que représente de telles techniques
pour la société alors que :
Un grand nombre d'enfants du tiers monde pourraient être
sauvés, face à une seule fécondation in-vitro,
Qu'il faudrait concentrer les efforts de la médecine
sur les causes de la stérilité.
Cela étant, la fécondation in-vitro prouve
par a + b, que la vie débute dès la conception.
b)
L'insemination artificielle avec donneur
La
situation sur le plan juridique est ici relativement mure; il
y a un certain nombre de cas, la durée de la pratique suffisante
et un consensus devrait être trouvé.
Cependant sur le plan éthique des contro-verses subsistent
:
On prive l'enfant de la connaissance de la moitié
de son capital génétique du fait de l'anonymat du
donneur.
Surtout dans le cas d'une mère célibataire,
on prive à tout jamais l'enfant de la connais-sance de
son père.
Or il y a, comme l'écrit Evelyne SULLEROT, un essentiel
pour le droit de l'enfant : c'est de connaître son père
et sa mère et dans la mesure du possible d'être élevé
par eux.
c)
Mère de substitution
Définition:
une femme accepte de conce-voir un enfant par insémination
artificielle du sperme du mari du couple stérile, de le
porter à 9 mois et de le mettre au monde.
Cette
femme est naturellement la mère de cet enfant mais elle
le donne, dès sa naissance, à ceux qui se définiront
alors comme ses parents.
Ainsi
rien de nouveau au plan technique, mais l'important est l'intervention
du TIERS.
La FEMME qui se prête à l'opération.
l'INTERMEDIAIRE
MEDICAL qui l'organise et le suit pendant plusieurs mois.
Au
plan juridique, le recours à cette pra-tique est en l'état
du droit ILLICITE puisque le droit commun dit que l'ENFANT est
celui de la FEMME qui l'accouche.
Cette
FEMME réalise ici la CESSION d'un enfant, selon un engagement
contracté par avance en fraude de la loi sur l'ADOPTION
: celle-ci prévoit en effet l'intervention d'un juge qui
doit, avant, apprécier l'opportu-nité de l'intérêt
de l'enfant.
De
plus, l'intermédiaire médical, peut être accusé
d'incitation d'ABANDON d'enfant.
Au plan éthique, la mère de location agit-elle en
responsable ?
En
toute bonne foi, elle veut rendre service en donnant un enfant
au couple qui le désire, mais peut-elle pendant toute sa
grossesse se désintéresser de l'enfant qui tisse
avec elle des liens affectifs extrêmement profonds ? Peut-elle
l'oublier après la naissance ?
Les
défenseurs de la méthode comme le Dr. Geller de
Marseille affirment que devant l'accroissement des consultations
pour stérilité féminine (âge tardif
de procréation) le recours aux mères d'accueil s'imposera
dans l'avenir.
Il
n'en reste pas moins que cette pratique comporte des risques pour
ceux qui en toute bonne foi y participent :
Pour la femme qui, ne sachant envisager un travail totalement
gratuit, pourra être exploitée au plan matériel,
Pour l'enfant surtout, puisque l'on décide d'emblée
de séparer la mère de son enfant.
Pierre
Delmas
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, Décembre 1985
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