On
sait le bruit qui a été fait, récemment,
autour de M. Jacques Attali, conseiller économique du président
de la République, qui avait, il y a deux ans, tenu des
propos sur l'euthanasie qui sont parfaitement inadmissible.
M.
Jacques Attali a prétendu qu'on avait mal compris sa pensée,
qu'on n'avait présenté que des phrases extraites
de leur contexte et il a attaqué en diffamation l'auteur
d'un tract à ce propos.
La
doctrine de M. Attali est pourtant parfaitement claire. On en
jugera par les extraits étendus que nous reproduisons.
Ces extraits soulignent bien le vice essentiel du système
qui est : l'économisme. La santé et la vie de l'homme
sont menacées si l'économisme devient la norme pour
une politique de la santé.
Qu'on
en juge.
Marchandisation
(1)
« La
production de consommateurs et leurs entretien coûtent cher,
plus cher encore que la production de marchandises elles-mêmes.
Les hommes sont produits par des services qu'ils se rendent les
uns aux autres, en particulier dans le domaine de la santé,
dont la productivité économique n'augmente pas très
vite. »
« La productivité de la production de machines,
augmente plus rapidement que la productivité relative de
la production de consommateurs. Cette contradiction sera levée
par une transformation du système de santé et d'éducation
vers leur marchandisation et leur industrialisation. »
(p. 265).
Cynisme
mis à part
« Mais
dès qu'on dépasse 60/65 ans, l'homme vit plus longtemps
qu'il ne produit et il coûte cher à la société. »
« D'où
]e crois que dans la logique même de la société
industrielle, l'objectif ne va plus être d'allonger l'espérance
de vie, mais de faire en sorte qu'y l'Intérieur même
d'une durée de vie déterminée, l'homme vive
le mieux possible mais de telle sorte que les dépenses
de santé seront les plus réduites possible en terme
de coûts pour la collectivité. Alors appareil un
nouveau critère d'espérance de vie : celui de la
valeur d'un système de santé, fonction non pas de
l'allongement de l'espérance de vie mais du nombre d'années
sans maladie et particulièrement sans hospitalisation.
En effet, du point de vue de la société, il est
bien préférable que la machine humaine s'arrête
brutalement plutôt qu'elle ne se détériore
progressivement. C'est parfaitement clair si l'on se rappelle
que les deux tiers des dépenses de santé sont concentrées
sur les derniers mots de vie. De même, cynisme mis à
part, les dépenses de santé n'atteindraient pas
le tiers du niveau actuel (175 milliards de francs en 1979) si
les individus mouraient tous brutalement dans des accidents de
voiture. Ainsi force est de reconnaître que la logique ne
réside plus dans l'augmentation de l'espérance de
vie mis dans celle de la durée de vie sans maladie.»
Et
plus loin: « l'euthanasie sera un des instruments
esentiels de nos sociétés futures dans tous les
cas de figures. Dans une logique socialiste, pour commencer, le
problème se pose comme suit : la logique socialiste c'est
la liberté et la liberté fondamentale c'est le suicide
; en conséquence, le droit au suicide direct ou indirect
est donc une valeur absolue dans ce type de société.
Dans une société capitaliste, des machines à
tuer, des prothèses qui permettront d'éliminer la
vie lorsqu'elle sera trop insupportables ou économiquement
trop coûteuse, verront le jour et seront de pratique courante.
Je pense donc que l'euthanasie, qu'elle soit une valeur de liberté
ou une marchandise, sera une des règles de la société
future. » (pp. 274-275).
(1)
- Ce texte, comme les suivants, est extrait de l'interview de
M. Jacques Attali publié par Michel Salomon dans son livre
"l'Avenir de la Vie" (Segher éd.).
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, avril 1982
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