Le
Dr Bernard SAVY, Président de l'Union Nationale pour
l'Avenir de la Médecine (U.N.A.M.) et aussi
de l'Union Nationale des Assurés sociaux (U.N.A.S.)
a fort heureusement accepté d'apporter son témoignage
au sujet de l'action très vigoureuse qu'il avait menée,
en janvier 1982, pour dénoncer les dangereuses théories
d'un collaborateur du Président de la République
au sujet de l'euthanasie.
Se
préoccuper de l'avenir de la Médecine si la vie
n'était pas garantie, ce serait un non-sens, car on se
demande quel intérêt on aurait à soigner des
gens dont on ne serait pas sûr que leur vie soit préservée.
Or,
dans ce domaine, depuis le début de ce siècle, on
a fait un progrès extraordinaire, qui est peut-être
la plus belle réussite de ce siècle. Mais à
quoi servirait ce progrès si la vie elle-même était
menacée par d'autres considérations.
Je
suis depuis son origine, et à travers l'amitié que
me voue votre ami Tremblay, l'action de votre Mouvement, et l'effort
que vous faites pour la vie à sa naissance. Je respecte
votre combat et je pense qu'il faut voir non seulement ce danger,
mais aussi celui qui porte sur la fin de la vie.
Car
les sociétés évoluent, et au-delà
des forces qui ceuvrent contre la vie, il faut voir comment se
déroulent les problèmes sociaux et politiques dont
dépend la vie de l'homme. II ne faut pas penser que la
vie est respectée par tous les régimes.
Aujourd'hui,
nous avons précisément la preuve que certains membres
du gouvernement, à pensée socialiste, ont des conceptions
particulières sur ce problème. II ne faut pas s'affoler.
II ne faut pas généraliser, il faut simplement constater
que les doctrinaires peuvent avoir, sur des points capitaux des
notions très différentes des nôtres.
Et
ceci s'explique car dans une société où l'on
fait passer l'intérêt de la collectivité avant
l'intérêt des individus, il est clair que l'individu
ne compte plus. Beaucoup de sociétés sur la terre
peuvent avoir des conceptions de ce genre. Mais dans les civilisations
occidentales, nous nous sommes toujours fait un honneur de faire
passer l'intérêt de l'homme en premier.
A
partir du moment ou, au contraire, on s'imagine que nous sommes
là pour servir la société, que l'on va vivre
dans une structure où l'État providence va nous
prendre en charge, va devenir à la fois notre protecteur,
notre employeur, et gérer tous les problèmes qui
sont ceux de toutes les familles,on peut s'imaginer que les problèmes
économiques vont être un mobile important des décisions
politiques.
Quelque
soit peut-être la répulsion que vous auriez à
mêler vos problèmes humains à des problèmes
politiques, vous aurez toujours une société, une
médecine, un respect de la vie, qui sera celui de la politique
que vous vous choisirez. Par conséquent, nous avons une
double responsabilité, celle de défendre les valeurs
humaines auxquelles nous croyons et celle de choisir des systèmes
politiques qui les favorisent ou ne les favorisent pas.
Alors,
je veux seulement vous donner un exemple: c'est le message de
M. ATTALI, qui est le conseiller du Président de la République,
qui a son bureau à l'Élysée. C'est donc un
des hommes les plus importants en France actuellement. Or, celui-ci
a répondu, dans un ouvrage que voici, qui a été
publié par M. Salomon aux Éditions Seghers, à
quelques questions sur les problèmes sociaux. A la question
que lui posait son partenaire, « est-il souhaitable
de vivre jusqu'à 120 ans ? »,
M. ATTALI répond par des propos inquiétants.
Monsieur
SAVY lit alors la réponse de M. ATTALI, qui a été
publiée assez largement ces derniers mois.
Nous
avons cru de notre devoir de faire connaître à nos
concitoyens de tels propos qui nous paraissent excessifs, dangereux,
inhumains, scandaleux. Un autre socialisme, il y a 40ans, amis
en pratique ces conceptions de la société. Je n'ai
pas besoin de vous évoquer tous les drames qu'ont connu
un certain nombre de personnes à travers l'Europe.
Alors,
nous avons distribué un certain nombre de tracts que vous
trouverez à l'entrée de cette salle. Vous en distribuerez
si vous voulez.
M.
ATTALI, parait-il, proteste. II dit qu'il n'a pas dit. II dit
que ce n'était pas cela que ça voulait dire. Moi
je veux bien. Mais j'ai été comme vous à
l'école. Quand on dit : « je suis, en
tant que socialiste, contre l'allongement de la vie »,
quand on dit : « le socialisme, c'est la liberté,
c'est le droit au suicide direct ou indirect »,
je pense que les mots ont un sens et que nous devons voir que
certaines doctrines peuvent entraîner les gens très
loin. II est tout à fait évident que la politique
en cours qui colite extrêmement cher se trouverait fort
allégée si par exemple, on n'avait pas reverser
quatre ou cinq cent milliards à des français qui
ne travaillent plus. Car, la société est ainsi faite
et nous en sommes fiers, car les gens qui travaillent cotisent
pour ceux qui ne travaillent plus. II est bien évident
que dans la mesure où l'on vit de plus en plus longtemps,
et nous en sommes fiers, où vous prendrez votre retraite
de plus en plus tôt, et ou l'on travaillera de moins en
moins, le poids de fa société qui ne travaille pas
va peser plus lourdement sur la société qui travaille.
Les gens qui travaillent, il n'y en a plus beaucoup. Par conséquent,
on peut imaginer qu'une doctrinaire de la société
nouvelle préfèrerait ne pas avoir à payer
pour ceux qui ne travaillent plus. Mais ça, c'est de l'abstrait,
c'est de la politique théorique. Cela me paraît dramatique
de mettre en valeur le respect de la vie et certaines idéologies
politiques.
Le
Dr SAVY termine en évoquant l'espoir que l'U.N.A.M. et
"Laissez-les-Vivre" puissent créer ensemble un
journal quotidien, tentative qui, à cette date, paraissait
encore réalisable et a malheureusement dû être
abandonnée depuis.
Dr
B. Savy
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, novembre 1982
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