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POLITIQUE FAMILIALE



IMPRIMER1959-1985 : distorsion de la protection sociale
au détriment des enfants (1)

La rétrospective de 1959 à 1985 des données officielles et "homogénes" des comptes de la protection sociale établie par l'I.N.S.E.E. (2), ainsi que les annuaires statistiques publiés par la C.N.A.F., permettent de mesurer l'ampleur de la distorsion du système social qui en une génération s'est développée au détriment de la seule part de la population qui n'exerce aucun poids politique : les enfants.

Pour comprendre le mécanisme de cette dérive qui, en altérant ses principes, a peu à peu conduit il vider de son contenu la politique familiale qui fut à la Libération l'œuvre du Général de Gaulle, puis de la quatrième république, il faut bien garder à l'esprit que la catégorie des "salariés" représente dans la nation l'essentiel des adultes qui constituent leurs familles ; autrement dit, tout ce qui touche les revenus salariaux concerne directement les familles et par ricochet la démographie du pays (mariages, naissances). C'est pourquoi les promoteurs (Adolphe Landry, Alfred Sauvy) de la politique familiale (code de la famille) ont toujours fortement insisté sur le caractère compensatoire des allocations familiales, qui vise à compenser largement, pour les parents des principales catégories sociales, la charge de l'enfant supplémentaire ainsi assimilé il un investissement pour la collectivité nationale. Ce principe de compensation se distingue radicalement des principes des politiques de répartition des revenus, de justice sociale et justice fiscale, lesquelles relévent des ministères et services spécialisés. Or depuis les années 1970, ces différents principes n'ont cessé d'être amalgamés, dissolvant le caractère compensatoire des allocations familiales, et altérant ainsi profondément la politique familiale et sa capacité de soutenir la natalité du pays, objectif premier du législateur.

En outre, dans les pays qui ont largement dépassé le seuil de la pauvreté absolue, les comportements socio-démographlques sont sensibles non aux revenus absolus, mais aux revenus relatifs lesquels conditionnent les modes de vie sociaux.

C'est pourquoi le législateur, en instituant le système des allocations familiales, avait prévu leur indexation sur les salaires (maintien du niveau de vie social), et non sur les prix (maintien du pouvoir d'achat) : les allocations familiales devaient re-ter indexées sur l'évolution du salaire de l'O.S. de la métallurgie dans la région parisienne !

La protection sociale étant exclusivement financée par les salaires, c'est-à-dire d'abord par les familles (cotisations sociales indexées sur les salaires : cotisations salariales + cotisations "patronales" – en fait prélevées elles aussi sur la masse salariale), Il était en effet indispensable, pour préserver l'efficacité dela polltlquelamillale, d'indexer également les allocations familiales sur les salaires.

L'abandon progressif de ces principes s'est traduit par une dérive accélérée au cours d'une génération du système de la protection sociale au détriment exclusif des allocations familiales et des enfants, comme l'illustrent très clairement les trois graphiques ci-joints :

La première courbe montre depuis 1959, l'accroissement considérable, accéléré depuis 1974, du poids du financement prélevé sur les salaires (donc sur les revenus familiaux) de l'ensemble de la protection sociale.

Le second graphique montre comment, Issues de ce IInancement, les trois catégories de prestations par tête allouées aux chômeurs, aux personnes du troisième âge et au système de santé, ont toutes été multipliées depuis 1959 par un facteur de l'ordre de 220 % à 250 % par rapport au salaire net moyen (caractérisant le niveau de vie social des familles). Ce mouvement traduit le poids politique de ces catégories sur l'allocation des ressources de la protection sociale. Encore l'accroissement des prestations versées au bénéfice du troisième âge est-il ici sous-estimé : Le système de santé est en effet de plus en plus concerné par les besoins des personnes âgées. La part de l'hospitalisation dans le budget de la santé n'a cessé en particulier d'augmenter, or l' ''hospitalisation lourde", concerne de plus en plus les personnes du quatrième âge. Si cet effet était pris en compte. la courbe "prestation santé / Population totale" traduirait depuis 1959 une croissance de l'ordre de 130 % à 150 % au lieu de 220 % par rapport au salaire net moyen. La courbe relative à la croissance des prestations moyennes versées au bénéfice des besoins des personnes âgées rapportées au salaire net moyen en serait relevée d'autant (et dépasserait les 300 % depuis 1959).

En revanche, le troisième graphique illustre la dégradation Impressionnante des allocations familiales versées aux enlants par rapport au salaire net moyen (niveau de vie social des familles), traduisant le dépérissement du principe de compensation qui fonde l'efficacité de la politique familiale pour le soutien de la natalité.

Le parallélisme ainsi établi entre la chute de la fécondité et la dégradation de la politique familiale, s'il ne saurait bien sûr constituer une preuve d'un effet mécanique constant exercé sur la fécondité des familles, démontre clairement néanmoins qu'aucun effort de restauration de la politique familiale n'aura été entrepris pour tenter d'en enrayer la chute au cours des années 1967 à 1978.

Or plus la fécondité baisse, pius s'accroit la proportion des personnes des troisième et quatrième âges dans la société ; plus s'accroît aussi leur poids politique qui devient déterminant, et plus s'alourdit la charge de leurs besoins qui deviennent prioritaires dans le système social financé par les familles au détriment de ceux des enfants déjà nés et éventuellement à naître.

Ainsi, à mesure du vieillissement de la population, les familles sont-elles peu à peu exclues des principaux bénéfices de la protection sociale qu'elles financent.

Ce mécanisme cumulatif est d'autant moins réversible qu'il se prolonge plus longtemps. Il est de nature à compromettre les capacités de renouvellement de la population. Il frappe les sociétés contemporaines avancées. Nombre de nos.voisins ~uropéens en sont atteints pius sévèrement encore que nous-mêmes.

Ce processus constitue une illustration de la dynamique socio-démographique du "Catoblépas" et du principe général de la "loi newtonienne de pesanteur démographique", exposés en 1987 dans un document I.N.E.D. (3), et présentés à la communauté scientifique internationalie lors du Colloque scientifique de Vérone (10-12 Février 1988) (4).

(1) Cf. Futuribles,n° 123. juillet-Août 1988, (pp. 77-80). Cf. aussi Population et Avenir, n° 588, Mars--Avril 1988, dossier "Vieillissement el Protection sociale: après nous le déluge ?". (pp. 14-16).
(2) Les comptes de la protection sociale de 1959 à1985, série "Archives et Documents" n° 194, I.N.S.E.E., Paris. 1987.
(3) Niveaux de vie et fluctuations démographiques. Contribution à l'analyse séculaire de la fécondité et des interactions entre populations: Vers une théorie socio-économique de l'implosion démographique de l'après-transition. Ph. B. de C. I.N.E.D., Paris. 1987.
(4) Demographic Modelling, XXIVth International Conference of the Applied Econometries Association, Verona, February 10/11/12.1988.

Philippe Bourcier de Carbon

© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, juin 1989

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