Le
premier des droits de l'homme, inaliénable et sacré,
c'est le droit de vivre. Sa vie il la reçoit de ses parents
qui, unis dans une famille, lui assurent la subsistance et l'éducation.
Les familles sont les cellules de base de la société
et l'enfant est sa grande richesse. Sans enfants, pas de renouvellement
des générations, donc plus de société,
c'est une évidence. Mais aussi quand la pyramide des générations
repose sur une large base, c'est-à-dire sur une jeunesse
nombreuse, l'avenir de tous est assuré : c'est le plein
emploi puisque la demande augmente, donc l'offre aussi ;
l'expansion se fait d'elle-même sous la pression des besoins.
Ce qui est moins évident dans la période malthusienne
que nous connaissons. Mais un exemple va le prouver. En novembre
1938, en plein marasme économique, le gouvernement Daladier
autorise les heures supplémentaires. Ceux qui font plus
de 40 heures passent de 3 à 35 %, le nombre de chômeurs
diminue de 4 %, (emploi augmente de 2,5 %. Trop tard : pendant
ce temps, 35 millions d'Allemands font des semaines de 50 à
80 heures et accumulent ainsi armement et richesses dont le marché
augmente leur puissance.
L'enfant
devenu adulte, par son travail productif, maintient la valeur
de la monnaie, dont en particulier la retraite des personnes âgées
payée par la population en activité. Si mes prestations
vieillesse ont pu augmenter ces dernières années
d'une façon spectaculaire (+ 24,5 % entre 1973 et 1974),
c'est parce que les générations nombreuses d'après-guerre
sont arrivées à l'âge du travail et que leurs
cotisations améliorent le financement de la Sécurité
sociale.
Que
ce soit donc dans l'intérêt personnel de l'enfant
ou pour sauvegarder l'équilibre de la société,
le devoir de l'État, garant du bien commun, est de mener
une politique familiale de justice qui permette à toutes
les familles, de quelque condition sociale qu'elles soient, de
faire face à leurs responsabilités éducatives
sans qu'elles en subissent une dégradation de leur niveau
de vie.
C'est
cette exigence de solidarité et de justice du corps social
qui est à l'origine du principe dit de compensation des
charges familiales et qui trouve son application dans l'institution
d'une part des Allocations familiales, système de redistribution
d'un certain pourcentage des salaires entre les salariés
qui élèvent des enfants en fonction du nombre et
de l'âge de ces enfants, et d'autre part du quotient familial
selon lequel un revenu assurant la subsistance de plusieurs personnes,
ne doit pas être imposé autant que le même
revenu destiné à une personne seule.
Exclus
du bénéfice de la croissance
Mais
ces principes élémentaires de justice, d'équité
et même de prudence, qui ont provoqué le magnifique
sursaut démographique de l'après-guerre, sont battus
en brèche depuis qu'ils ont été légalisés
en 1945. En particulier la loi du 22 août 1946
qui indexait le calcul des Allocations familiales sur le S.M.I.C.,
voulant ainsi éviter le dépréciation éventuelle
des Allocations familiales avec celle du franc, a été
violée dés sa promulgation. Fin 1948, le salaire
horaire effectif dépassait déjà du tiers
le salaire-étalon servant au calcul des Allocations familiales
! Le décalage entre les deux n'a cessé, depuis,
de s'agrandir vertigineusement. A l'heure actuelle, ce salaire
de base est de 694 F pour les Allocations familiales proprement
dites ; de 194,50 F pour le salaire unique qui a la prétention
de compenser le perte de son salaire pour une mère qui
se consacre à l'éducation de son enfant.
II
faut bien savoir que quand on annonce à grands titres dans
les journaux une fois par an « nouvelle augmentation
de 4,5 % des Allocations familiales », il
s'agit en réalité de l'augmentation de 4,6 % du
salaire de base fictif servant au calcul des Allocations familiales,
soit même pas 1 F par enfant en 1976. L'opinion est trompée,
elle pense « les familles sont riches, on fait bien
assez pour elles ».
La
vérité, c'est que les ressources brutes des familles
sont passées, si on prend (indice 100 en 1950 :
à
244 en 1974 pour un ménage manuvre sans enfant
à 186 en 1974 pour un ménage manuvre deux
enfants
à 169 en 1974 pour un ménage manuvre trois
enfants
à 163 en 1974 pour un ménage manuvre quatre
enfants
à 262 en 1974 pour un ménage ouvrier qualifié
sans enfant
à 196 en 1974 pour un ménage ouvrier qualifié
2 enfants
à 191 en 1974 pour un ménage ouvrier qualifié
trois enfants
à 183 en 1974 pour un ménage ouvrier qualifié
4 enfants
L'indemnité
compensatrice (des impôts locaux) 13 % base de calcul à
l'origine, est de 1,4 % actuellement soit 15,09 F depuis le 1er
janvier 1959.
Ou
encore la vérité, c'est que le transfert par enfant,
rapporté au produit national brut s'est effondré
: en 1946, le transfert par enfant par rapport au produit national
brut (P.N.B.) et par habitant s'élevait à 22 %.
En 1972 il était tombé à 8 % et en 1975 à
5,9 %.
Le
montant des Allocations familiales est passé de 19,3 %
à 4,9 %. La masse des Prestations familailes/P.N.B. est
tombée de 2,68 à 2,40 % entre 1973 et 1974, soit
une diminution de 1 7 %. Les Prestations familiales représentaient
5,5 % des revenus ménages en 1956 ; 3,23 % en
1973 (moins 40 %).
De
ces chiffres extraits des calculs de l'I.N.S.E.E., Ministère
du Travail, de la C.N.A.F., on peut tirer deux sortes de conclusions :
« Les
enfants ont été, en France, les seuls exclus du
bénéfice de la croissance » (Pierre
CHAUNU de l'Histoire à la prospective).
ou bien
« L'enrichissement du pays depuis 1945 a massivement
profité aux familles »(Simone VEIL
au Sénat, 22 avril 1976).
Comment
s'en étonner ?
Mais,
au fait, comment s'étonner du sort qui est fait en France
à l'enfant et à la famille.
1)
Quand pratiquement, la charge de la moitié des enfants
mineurs est supportée par le 7ème de la population,
et qu'à peine 2,5 % des Français élèvent
un quart des enfants.
2)
Quand tout est pensé en France depuis des générations
en fonction de findividualisme ambiant :
la rémunération a été exclusivement
individuelle et a maintenu la famille du travailleur dans la condition
prolétarienne depuis le début de l'ère industrielle,
jusqu'à la loi du 11 mars 1932 qui obligea las entreprises
à adhérer à une caisse de compensation des
Allocations familiales ; iI a fallu attendre la loi du 29
juillet 1939 dite Code de la Famille, et celle du 22 juillet
1948 qui rend obligatoire le Sécurité sociale (régime
de prévoyance pour tous les salariés et leurs familles
qui y intègre les Allocations familiales) pour que les
charges familiales soient prises en considération ;
le logement : à Paris, 65 % des logements construits
depuis 1946 ne comportent que deux pièces ;
l'organisation du travail qui ne tient compte de la maternité
qu'exceptionnellement pour ce qui est des horaires, congés,
garderies, etc.
D'où
est née l'expression "l'enfant à la clé"
pour désigner l'enfant voué à la solitude
et à la tentation par l'absence de sa mère, et qui
porte au cou le clé de l'appartement qu'il trouvera vide
en rentrant de l'école.
3)
Quand la France vieillit si vite que les personnes âgées
qui représentaient 8 % de la population en 1900, 12,5 %
en 1968, en représenteront 14 % en 1980 ; que la part
des retraites dans le budget de la Sécurité sociale
a dû passer de 38,3 % en 1962 à 43,1 % en 1973, tandis
que la part des Allocations familiales tombait de 26 à
75,9 % ; par un habile transfert des points de cotisations
pour les Allocations familiales de 16,75 % à l'origine
à 9 % actuellement, ceux de l'Assurance Vieillesse (autrefois
intégrés à l'Assurance Maladie) passent dans
ce même temps de 8,5 à 10,75 %.
4)
Quand ce sont les mêmes qui ont déclaré une
guerre à mort à l'enfant, qui tiennent son sort
entre leurs mains, et qui ont eu le front de prétendre :
« La politique familiale figura bien au 1er' plan
des préoccupations gouvernementales » (Jacques
CHIRAC à l'Assemblée Nationale, le 18 décembre
1974, lendemain du vote de la légalisation de l'avortement).
« C'est pour nous un objectif national de redresser
la natalité française »(Simone
VEIL au Sénat, le 22 avril 1976).
« En septembre, le gouvernement proposera aux Français
une politique globale de soutien à la famille »
(le Président de le République, La Bourboule,
le 13 juillet 1975).
« La famille est devenue l'objet d'une attention
privilégiée de la part de l'État »
(Simone VEIL au Sénat le 22 avril 1976).
« Dans mon esprit, la famille mérite d'être
soutenue et fortifiée par elle-même »
(Le Président de la République au XXXème
anniversaire U.N.A.F. le 12 juin 1976).
Et encore « je suis décidé d fortifier
l'institution familiale par une politique globale de la famille
menée en concertation avec les organisations familiales »
(Le Président de la République, La Bourboule,
13 juillet 1975).
Politique
d'abandon
Dans
les projets à l'étude, on peut toujours chercher
une volonté politique de promotion qui illustrerait les
belles paroles par des mesures concrètes, mais on découvre
sans équivoque la mise en place d'une politique d'abandon :
Abandon
de la notion de compensation des charges familiales, remplacée
par elle d'assistance eux plus défavorisés : le
salaire unique avait déjà été supprimé
aux familles qui gagnent plus de 4 000 F par mois : argument facile
et qui plaît : qu'est-ce que 96 F dans un budget de 4000
F, avait osé prétendre le Premier ministre d'alors
(CHABAN-DELMAS). Mais ce sont 18 carnets de métro,
à demi-tarif pour familles nombreuses. On ne dit pas combien
de personnes se partagent les 4 000 F. Alors, ce salaire unique,
on va le distribuer aux pauvres.
C'est
par cette décision anormale, injuste et sans précédent,
qu'a été avalisée la notion d'assistance.
Les familles deviennent des assistées, mais attention :
pas par l'ensemble de la Nation, c'est-à-dire par les plus
favorisés, soit pratiquement ceux qui n'élèvent
pas d'enfants ; non, par un prélèvement sur
le budget de familles plus aisées chargées d'enfants,
en exonérant tous les gens qui disposent des mêmes
ressources et n'ont pas d'enfant. C'est une amélioration,
toute relative d'ailleurs, d'une certaine catégorie de
familles par la réduction des droits d'autres familles.
Cette
nouvelle optique a été annoncée à
plusieurs reprises par le Président de la République,
le Premier ministre, le ministre de le Santé, le "complément
familial" qui doit "profiter" aux 2/3 des familles
(sous-entendu : des familles qui ont 1 enfant de moins de 3 ans
ou au moins 3 enfants) sous plafond de ressources sera en réalité
très bas, environ 300 F, non indexé, et sera financé
par la suppression des Allocations familiales d'un très
grand nombre de familles.
C'est
ce qu'on appelle en langage ministériel « réactualiser
le dispositif de protection matérielle des familles ».
Premier
coup d'arrêt d la politique familiale.
Abandon
de la règle du quotient familial sur l'I.R.P.P. Dans
sa déclaration d'impôts, le chef de famille compte
les personnes dites "à charge" : lui-même
1 part, sa femme 1 part, chacun de ses enfants 1/2 part s'ils
ont moins de 25 ans et ne font pas de déclaration séparée.
Le total des revenus est divisé par le total des parts
et imposé en conséquence. Ce système institué
depuis 30 ans, vise à maintenir un niveau de vie identique
entre deux familles qui ont les mêmes revenus mais pas le
même nombre d'enfants à charge, ce qui est juste
et logique : un revenu de 5 000 F par exemple qui doit assurer
la subsistance de 5 personnes, ne doit pas être imposé
comme celui d'un célibataire, compte tenu que l'impôt
indirect, lui, est soumis à la règle du multiplicateur
fiscal. C'est aussi le seul élément de compensation
familiale qui ne soit pas touché par l'inflation.
II
est remis en cause :
1)
Sous prétexte qu'à partir d'un certain revenu, les
Allocations familiales seraient sans efficacité. Erreur
: car ces familles à revenus plus élevés
perdent les droits à d'autres avantages : bourses, bons
de vacances, frais de garde, H.L.M., etc. Il y a donc correction
par rapport eux familles pauvres, et leurs moyens baissent par
rapport aux célibataires de mémo qualification professionnelle.
Exemple
: Un célibataire qui gagne 17 500 F par an, est pas imposé.
Un
père de famille qui gagne 56 000 F par an pour 5 personnes,
qui reçoit 7 100 F d'Allocations familiales mais paie 2 600
F l'I.R.P.P., dispose donc de 61 000 F soit 17 000 F par adulte
plus 8 700 F par enfant. Pour une qualification professionnelle
bien supérieure, le niveau de vie de sa famille est ramené
à celui du célibataire Smicard. Il a quand même
payé 2 800 F d'impôts directs plus 7 000 F d'impôts/consommation,
soit à peu près les Allocations familiales ou l'incidence
du quotient familial. Le célibataire, pendant ce temps
n'a rien payé d l'I.R.P.P. et a versé 1 900 F à
l'impôt sur la consommation.
2)
Sous prétexte que le quotient familial fait perdre 8 milliards
de francs au fisc qui pourrait les redistribuer aux familles pauvres.
Erreur : ce n'est pas le même budget. Ce qui entre dans
les caisses de l'État au titre de l'I.R.P.P. n'entre pas
dans les Caisses d'Allocations familiales qui reçoivent
des cotisations sur les salaires. Les familles pauvres n'en verront
pas un sou, et l'État récupérera par ce biais
les Allocations familiales.
Si
on devait aller jusqu'au bout du raisonnement, il faudrait supprimer
aussi le quotient matrimonial, c'est-à-dire la part-conjoint,
et les couples sans enfants devraient accepter de payer deux fois
plus d'impôts.
En
somme, toujours la même argumentation démagogique
: les riches en ont trop. Comme ce serait tout de même un
peu gros de leur supprimer le quotient familial d'un seul coup,
on leur permettra d'enlever une somme forfaitaire de leurs revenus,
mettons 5 000 F. Ça parait important 5 000 F mais dans
2 ans, 10 ans, 20 ans, ils n'en vaudront plus que 500, 50 et même
5, et ils disparaîtront à leur tour comme le salaire
unique qui avait si peu de poids dans un budget.
Deuxième
coup d'arrêt à la politique familiale.
Abandon
de la notion de solidarité nationale. II parait que
« l'opinion publique n'accepterait pas que lui soit
présentée une politique ouvertement nataliste »
(Simone VEIL au Sénat).
L'opinion,
chacun sait qu'on la fabrique pour la solliciter. Actuellement
si elle est beaucoup plus sensibilisée par les problèmes
de santé et de vieillesse parce qu'ils sont toujours à
la une de l'actualité, et beaucoup moins par ceux de la
famille, c'est qu'elle craint inconsciemment la surpopulation,
perspective totalement exclue pour la France et pour L'Europe.
La France est sous-peuplée, elle doit faire appel à
la main -d'uvre étrangère pour développer
ses richesses. Et en tenant compte des 10% de naissances étrangères
sur son sol, le taux de renouvellement de se population est tombé
à 0,89 en 1975, 0,82 en 1976.
C'est
comme si un monsieur maigre faisait un régime taille de
guêpe sous prétexte que son voisin est trop gros.
Si
les gens se trompent, c'est parce qu'ils sont trompés par
un matraquage insensé qui espéra les aveugler. Mais
il y a une lueur d'espoir puisque si en 1974, les 75 % de personnes
interrogées souhaitaient une population stationnaire, il
n'y en avait plus que 65 % en 1975...
II
parait aussi que « l'attitude devant la natalité
semble plus influencée par le climat social que par des
mesures d'incitation financière »(Veil
au Sénat).
On
dit ça, ce qui dispense de faire l'effort nécessaire.
Mais l'expérience de notre pays, il y a une génération,
quand la mise en place, en 1946, de la politique familiale la
plus hardie du monde a fait coïncider la natalité
la plus élevée depuis 200 ans avec un essor économique
sans précédent comme des pays de l'Est ces
dernières années, s'inscrit en faux contre cette
assertion toute gratuite.
En
Tchécoslovaquie, depuis 3 ans, on a majoré les Allocations
familiales, créé une allocation de la mère
au foyer, doublé la prime à la naissance, allongé
le congé maternité jusqu'à 26 semaines avec
salaire maintenu intégralement, et institué des
prêts aux jeunes ménages, des réductions de
loyer. Résultats : remontée en flèche de
la courbe des naissances : la somme des naissances réduites
par femmes est passée de moins de 2 à 2,5.
Même
politique familiale, accompagnée dans tous ces pays de
sévères restrictions aux avortements légaux,
en Roumanie. Hongrie, Pologne : mêmes résultats.
Le
rapport de l'I.N.E.D. au Gouvernement sur ce sujet insiste beaucoup
sur le coût très élevé de cette remontée
de la natalité.
Allons,
les Français qui grèvent la Sécurité
sociale pour consommer des pilules anti-bébé (1
milliard de francs) et pour tuer une bonne partie de ceux qui
réussissent à passer quand même (encore 1
milliard de francs) peuvent faire l'effort d'assurer la relève.
Au train actuel, les retraites, assurances vie, épargnes
et autres placements des gens qui se croient prévoyants
sont perdus pour les moins de 45 ans. Pas d'enfants, pas de retraites,
parce qu'il n'y aura personne pour les payer.
En
résumé, abandon du "Contrat de Progrès"
promis aux familles par le Président POMPIDOU au
XXVème anniversaire de l'U.N.A.F.
Mais
pour leur XXXème anniversaire, Valéry GISCARD
D'ESTAING les a prévenues : « On ne peut
vivre au-dessus de ses moyens ».
Cinq
ans, ont passé, cinq ans de changements, cinq ans de régression
sociale. La voilà cette "attention privilégiée"
dont l'État se vante de faire profiter la famille.
Guerre
à l'enfant
L'incohérence
n'est qu'apparente quand on prétend être décidé
à fortifier la famille et qu'on refuse, dans le même
discours, d'en prendre les moyens.
En
réalité, c'est une politique de destruction qui
s'inscrit dans la droite ligne des lois d'avortement, de contraception,
d'adandon de famille par consentement mutuel : à la famille
déjà ébranlée, on coupe les vivres.
La guerre à l'enfant se fait plus insidieuse. Ses droits
propres sont niés, après son droit imprescriptible
à la vie, ses droits par rapport eux revenus de ses parents,
comme il était une bouche Inutile, puis ses droits par
rapport ! la Communauté nationale qui jusqu'ici prenait
en charge une partie du coût de sa formation, quel que soit
le niveau économique de sa famille, en vertu de sa qualité
de futur producteur, de futur cotisant, de futur contribuable.
II
est attaqué partout :
Est-il d'une famille pauvre : après avoir proposé
à sa mère de soulager "sa détresse"
en le tuant hygiéniquement et légalement, on va
offrir à ses parents "un complément familial"
si bas 300 F environ qu'il ne permettra pas à
sa mère de rester chez elle pour l'élever, et avec
un plafond de ressources si bas qu'un nombre infime de familles
en profitera ; pas l'enfant lui-même en tous cas
gardé pour gardé puisque ce complément
sera reversé à la crèche : et voilà,
le tour est joué, une partie du coût des équipements
sociaux qui est très élevé au moins
60 F par jour par enfant est transféré du
budget des Communes ou de l'État à celui des Caisses
d'Allocations familiales, après l'Allocation Logement des
personnes âgées, l'Allocation des handicapés
majeurs, l'Allocation aux femmes seules qui relevaient de l'Aide
Sociale, en attendant le tour des pensions alimentaires de certains
pères défaillants...
Est-iI d'une famille aux revenus moyens : tout réajustement
des Allocations familiales sur le coût de la vie est refusé;
c'est l'appauvrissement progressif.
Est-il d'une famille plus aisée : les quelques formes d'aide
qui lui permettaient de se maintenir au niveau de son milieu sont
supprimées purement et simplement ; avec les effets
de dissuasion escomptés sur les cadres et les professions
libérales dont le nombre d'enfants est justement plus élevé
que la moyenne.
Pour
se faire mieux admettre, cette politique sait se faire habile,
en dressant les catégories sociales les unes contre les
autres.
D'abord,
les familles de revenus différents. On l'a déjà
vu en ce qui concerne le salaire unique qui, par un extraordinaire
abus de pouvoir, est passé directement des poches des unes
dans celles des autres. Comme si, après avoir Institué
par exemple, une prime de rendement dans une entreprise, on décidait
tout à coup d'enlever celle des contremaîtres de
leur feuille de paie sous prétexte qu'au fond ce n'est
pas beaucoup pour eux 100 F, pour l'ajouter sur celle des manuvres,
tout en les obligeant à travailler toujours autant. Ce
serait un beau tollé ! Impensable ! La même
chose pour le quotient familial : on lance l'idée fausse
qu'il ne profite qu'aux riches, et la pilule passe toute seule.
On
dresse les vieux contre les jeunes, et réciproquement,
en faisant remarquer en passent (Simone Veil au Parlement
le 19 mai 1976) « qu'aller plus loin, ce serait
au détriment des personnes âgées ».
Le gâteau n'est pas assez gros, alors on sert d'abord ceux
qui ont des "avantages acquis" et qui peuvent les faire
valoir grâce à leur bulletin de vote : C'est
le racisme anti-jeunes ou anti-vieux provoqué par les adultes
au pouvoir.
On
dresse les malades contre les enfants : à un journaliste
qui l'interrogeait le 18 mai 1976 sur l'augmentation éventuelle
des Allocations familiales (½ S.M.I.C. réclamé
par l'U.N.A.F.), Simone VEIL a répondu « le
budget de la Sécurité Sociale ne permettra pas de
satisfaire une demande aussi lourde ». Or, chacun
sait que ce budget est en déficit et chacun redoute de
voir diminuer ses propres droits. Nouvel argument démagogique.
Mais,
Madame, ce n'est pas le même budget. De plus, celui des
Caisses d'Allocations familiales a un excédent accumulé
de 14 milliards de francs lourds, plus 1,5 prévu pour chaque
année 1975, 1976, 1977 : c'est le bien des enfants. On
n'a pas le droit de taper dedans pour que les grandes personnes
consomment des pilules et pratiquent l'avortement.
Enfin,
politique facile de la part de la majorité au pouvoir :
on a beau jeu d'annoncer qu'on va dépenser un milliard
pour la famille entre parenthèses, le 200ème
du budget du VIIème plan, le ¼ du budget du téléphone
oui, c'est beaucoup quand le Président de l'opposition
qui sait que son électorat est encore moins favorable à
l'enfant que celui de la majorité (1), annonce en même
temps qu'il diminuera les dépenses pour la jeunesse de
700 millions, et augmentera celles de la vieillesse de 26 milliards.
Même
procédé, même but : les personnes âgées
ont un bulletin de vote, les enfants n'en ont pas.
Donc
politique familiale d'abandon et de dissuasion, politique habile,
politique facile, mais politique injuste et mortelle, et qui fait
l'unanimité contre elle, comme en témoigne la lettre
du 9 juillet 1975 du Président de la Caisse d'Allocations
familiales de la Région parisienne au Président
de la Caisse nationale d'Allocations familiales, signée
de tous les administrateurs représentant aussi bien la
C.G.T., la C.F.D.T., le C.F.T.C., que l'U.N.A.F., la Chambre de
Commerce, les Chambres des Métiers, le C.N.P.F., les professions
libérales : lettre qui condamne fermement et unanimement
le critère des ressources pour l'attribution des Allocations
familiales, critère qui ferait des familles des assistées,
qui en demande instamment la suppression ainsi que la réduction
des prestations spécialisées, et exige une importante
augmentation des Allocations familiales.
Comme
en témoignent aussi les critiques du Sénat et le
débat de dix heures à l'Assemblée nationale
après l'exposé du porte-parole du Gouvernement.
Un amendement présenté par des parlementaires tant
de la majorité que de l'opposition réclamant une
loi-programme pour la famille fut déclaré irrecevable...
parce qu'il constituait une « injonction au Gouvernement ! ».
Cest
comme cela qu'on gouverne en démocratie.
Notre
choix de société à nous
Non,
Monsieur le Président de la République, vous
vous trompiez quand vous affirmiez le 24 mars dernier à
la télévision : « j'observe que toutes
les réformes qui ont été effectuées,
ont été acceptées et ne sont plus contestées
par personne ».
Nous,
Laissez-les Vivre, nous avons pris le parti de
l'enfant et notre choix va à une société
où tout le monde ait le droit et les moyens de vivre.
C'est
pourquoi nous réclamons :
l'abrogation
de l'acte provisoire du 17 janvier 1975, dit loi Veil, loi d'infamie
et de génocide ;
une
société où chaque enfant ait droit aux soins
et à la présence de sa mère ; c'est
pourquoi nous réclamons, l'institution du salaire maternel
égal au S.M.I.C., ouvrant droit à l'Assurance Maladie,
à l'Assurance Accident, à l'Assurance Vieillesse,
versé sans conditions de ressources à toutes les
mères au foyer qui élèvent leur enfant, comme
reconnaissance de l'éminent service social qu'elles accomplissent,
et assurant une réelle liberté de choix aux femmes
de plus en plus nombreuses qui le désirent et sont en majorité
des mères ayant beaucoup d'enfants. Un projet de loi est
actuellement à l'étude, concernant le statut professionnel
des "personnes qui pratiquent l'accueil d'enfants à
domicile", c'est-à-dire les nourrices et les gardiennes.
Eh bien, nous Laissez-les Vivre nous prétendons
que ce sont leurs mères qui sont les nourrices et les gardiennes
des enfants, et qu'il est injuste de pousser ceux-ci vers les
équipements sociaux très coûteux d'un État
de plus en plus contraignant et totalitaire au mépris de
leur équilibre psychologique et mental. Rappelons que ce
salaire maternel coûterait un milliard de francs, c'est-à-dire
exactement le prix des avortements légaux.
une
société, où la charge des enfants, véritable
investissement national, ne soit pas une sanction économique
pour leurs familles.
C'est
pourquoi, nous réclamons :
l'indexation des Allocations familiales sur le S.M.I.C. ;
la redistribution aux familles des excédents des
Caisses d'Allocations familiales ;
la réduction de la T.V.A. sur les articles de première
nécessité ;
le maintien et l'amélioration du quotient familial
en comptant désormais 1 part par enfant, son extension
à tous les impôts directs, le maintien d'une part
supplémentaire à vie aux ménages ayant élevé
au moins 3 enfants ;
le soutien aux familles nombreuses par un accroissement
substantiel de leur pouvoir d'achat en constante régression,
parce que c'est seulement leur effort qui freine la dénatalité ;
le plein emploi pour tous, en particulier pour les jeunes
dont le chômage pèse très lourd sur les familles
: certaines ont, 1, 2 et même 3 chômeurs à
charge et sans indemnité ;
logement et travail pour tous les jeunes ménages.
Enfin
pour coordonner cette politique familiale juste et cohérente,
pour gérer les fonds collectés à cette fin,
pour veiller à la promotion de la famille, un Ministère
de la famille, autonome et responsable investi de toute l'autorité
et de tous les crédits nécessaires.
Dans
un pays, où la liberté de ne pas avoir d'enfant
est encouragée, subventionnée, protégée
par la loi, on doit pouvoir jouir de la liberté d'avoir
des enfants et de les élever.
Nouvelle
tragédie
L'heure
n'a jamais été aussi grave pour la famille. C'est
la première fois qu'elle subit l'attaque d'une volonté
aussi délibérée de destruction.
La
croissance 0, politique de régression et de mort érigée
en doctrine officielle et présentée comme la panacée
universelle, a fait déjà trop de dégâts.
Des
exemples de l'actualité la plus récente :
Le
VIIème plan ne prévoit que la construction de 85 000
logements par an dans la Région parisienne, au lieu de
110 000, quand 250 000 familles sont mal logées
et que 730 000 jeunes vont atteindre l'âge du mariage en
1980 : il en faudrait au moins 130 000 par an pour satisfaire
les besoins. Et ce sont 350 000 emplois salariés du bâtiment
qui sont menacés.
La
municipalité Centre-Démocrate de Sannois (Vald'Oise)
vient de supprimer les abattements pour les charges familiales
sur les impôts locatifs : résultats, une augmentation
de ces impôts de 12 % pour 1 enfant, 30 % pour 2 enfants,
124 % pour 6 enfants cette année 1976.
Pourquoi
la perspective d'une France jeune et nombreuse provoque-t-elle
l'angoisse et la haine de certains ? Parce qu'elle trouble
leur mauvaise conscience : en donnant à des parents le
droit exorbitant de tuer leurs enfants, ils se sont donné
à eux-mêmes le droit de mener à sa perte la
société consentante. En faisant de l'enfant à
charge, l'ennemi public N° 1, ils ont en même temps
désigné le malade, l'handicapé, le vieillard
à charge. L'offensive de la mort douce, dite euthanasie,
est en train de reprendre de plus belle.
II
y va de la vie et de l'avenir de chaque enfant, de notre sort
à tous, de notre liberté : le vide appelle l'occupation ;
l'histoire récente l'a montré au prix de souffrances
inouïes.
Une
nouvelle tragédie a commencé.
C'est
pourquoi, nous, Laissez-les Vivre, nous qui avons
choisi la vie, la jeunesse, l'avenir, nous devons prendre les
moyens du redressement qui s'impose.
Une
parcelle de pouvoir est entre nos mains : notre bulletin de vote,
que nous devons retirer sans regret aux avares à courte
vue et aux irresponsables criminels, pour le donner à des
élus lucides fermement et publiquement décidés
à mener immédiatement la politique familiale de
justice et de liberté, cette politique qui a déjà
étonné le monde et provoqué l'admiration
et l'envie de nos voisins.
Dans
le beau pays de France, alors que parait le premier album-souvenir
du chien de la maison, quand s'ouvrent des cliniques
mutualistes pour animaux domestiques, quand des s traiteurs canins
" offrent leurs services gastronomiques avec livraison à
domicile de repas pour chiens, qu'au moins le couvert soit toujours
mis pour l'enfant.
(1)
Un sondage I.N.E.D. d'octobre 1974 montre que la dimension Idéale
de la famille pour un électeur de la majorité est
2,71 et pour un électeur de l'opposition 2,51.
Alix
Gobry
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, janvier 1977
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