Des
associations familiales et de nombreuses U.D.A.F. se
sont portées partie civile dans un procès intenté
par le Parquet de Paris contre ce qu'on appelle couramment les
"minitels roses". Deux arrêts successifs, en 1ère
instance et en appel, ont prononcé la relaxe des prévenus
en alléguant le vide juridique en cette matière.
A la suite du 2e arrêt du 12 juillet 1989, les associations
familiales se sont pourvues en cassation, car elles considèrent
à juste titre que ces messageries sont un danger pour les
jeunes et une incitation à la débauche. A l'appui
de leur opinion, voici les déclarations d'un condamné
à mort aux États-Unis, recueillies quelques heures
avant son exécution par le Dr James DOBSON,
Président de Focus on the Family.
Cet
homme, nommé Ted BUNDY, avait agressé
sexuellement et assassiné au moins 28 femmes. Il a
reconnu que c'était la pornographie qui avait déclenché
sa folie sexuelle meurtrière. L'idée généralement
admise est que ces individus ou sont anormaux de naissance, ou
le sont devenus à la suite d'une enfance malheureuse. Or,
Ted BUNDY a expliqué, dans son interview, comme il avait
« grandi dans un foyer merveilleux avec deux parents
chrétiens attentionnés et aimants ».
« Nous allions régulièrement à
l'église, a-t-il ajouté, et il n'y avait
à la maison ni jeu, ni tabac, ni alcool, ni bagarres ».
Pour
lui, le tournant a eu lieu lorsque, vers 12 ou 13 ans, il a par
hasard rencontré la pornographie douce sur les rayons d'un
drugstore et, de temps en temps, grâce à des livres
trouvés dans des poubelles, une pornographie plus dure
(hard), plus pernicieuse, celle qui implique la violence sexuelle.
Le processus une fois enclenché, c'est par étapes,
graduellement qu'il en est arrivé à un comportement
criminel.
Ted
BUNDY analyse très bien cette escalade : « une
fois accroché à la pornographie – et je considère
cela comme une sorte d'esclavage – je recherchais des sortes
de matériels toujours plus violents, plus explicites, plus
descriptifs. Comme pour la drogue, vous conservez une excitation
insatiable jusqu'à ce que vous atteigniez le point ou la
pornographie ne peut aller plus loin. Vous atteignez ce point
ou l'on saute le pas quand vous vous demandez si le fait de passer
à l'acte à ce moment-là vous apportera plus
que le seul fait de lire et de regarder » .
Après
des années de lutte contre cette pulsion criminelle, s'appuyant
sur des barrières établies dès l'enfance
par son éducation, il a eu soudain l'impression que quelque
chose s'était cassé net qu'il ne pouvait se contrôler
plus longtemps.
Ted
insiste sur le fait qu'il était, au fond, une personne
normale et menait une vie normale, qu'il n'était pas une
brute ni un pilier de bars : « les personnes de
mon genre ne sont pas des espèces de monstres-nés.
Nous sommes vos fils, vos maris, et nous avons grandi dans des
familles classiques. La pornographie peut atteindre et saisir
brusquement un gosse de n'importe quelle famille aujourd'hui
... aussi attentifs que soient ses parents ».
Il ajoute que c'est le cas de presque tous les hommes qu'il a
rencontrés en prison, poussés comme lui à
commettre des violences, et qu'une étude faite par le FBl
lui-même sur les homicides en série fait ressortir
un point commun à ces meurtriers à répétition
: la pornogaphie.
Enfin,
tout en avouant qu'il avait mérité son châtiment,
il ne peut cacher son amertume de voir cette société
qui le punit tolérer cependant que les rayons des magasins
soient pleins de ces choses mêmes qui envoient de jeunes
gosses sur la voie qui l'a mené à cette dépravation,
à ces crimes et finalement à la chaise électrique.
« Ce qui me fait peur, et même m'épouvante,
c'est ce que je vois à la télé. Les saletés
qui entrent dans les foyers aujourd'hui n'auraient pas été
montrées dans les spectacles pour adultes classés
X, il y a vingt ans ».
Je
crois que ce message devrait être médité chez
nous. Il est difficile de mettre en doute sa sincérité
: pourquoi cet homme aurait-il menti à quelques heures
de sa mort ? Les médias, si révoltés –
et à juste titre – chaque fois qu'un crime sadique
est commis, refusent d'en rechercher les causes profondes, de
peur de mettre en cause les "acquis" de la liberté
des mœurs et se sont bien gardés de diffuser cette
interview si riche d'enseignement. Quant on a connu la série
tragique de viols et d'assassinats d'enfants de l'an dernier en
France, lutter contre tout ce qui peut amener à de tels
actes, c'est bien lutter pour le respect de la vie.
Françoise
Rollin
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, novembre 1990
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