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HISTORIQUE DE LAISSEZ-LES-VIVRE – SOS FUTURES MÈRES



IMPRIMERXIe Congrès – Gérard-François Dumont :
Promouvoir la vie

Dans l'histoire démographique de la France, un sursaut démographique d'une vingtaine d'années est parvenu à surmonter le déclin. Cette renaissance n'est pas le produit du hasard. Elle a correspondu à l'état psychologique des Français, mais surtout à une prise de conscience politique. Quelques hommes, sensibilisés aux dangers du vieillissement de la population française, ont contribué àfaire voter en 1939 le Code de la Familie, dont l'application a débuté dès 1940. Ce code instituait une compensation des charges familiales permettant aux couples souhaitant élever des enfants de le faire dignement. L'efficacité de cette politique familiale a été certaine. Quatre constatations permettent de le montrer.

La fécondité a été plus marquée et plus durable en France que dans les pays voisins après la deuxième guerre mondiale. Ensuite, les enquêtes d'opinion ont indiqué que 97 % – pourcentage rarement atteint – des Français donnaient aux allocations familiales un rôle décisif dans la reprise de la natalité. D'autre part, la fécondité de la France a baissé beaucoup moins que celle de ses voisins depuis 1960. Cet écart positif peut être rapproché d'une législation familiale plus favorable. Enfin, les chiffres d'après-guerre indiquent une corrélation entre la fécondité des catégories sociales et l'application des allocations familiales aux différentes catégories, application qui ne s'est uniformisée que par la suite.

L'appauvrissement

Au long des années postérieures, deux changements sont intervenus.

La politique familiale a enrigistré une dégradation continue. Cette politique est devenue pratiquement marginale. Elle ne représente même plus 10 % des transferts sociaux. Les transferts concernant la vieillesse et la maladie forment la majorité du budget des transferts.

L'emploi a dépassé depuis 1981 le montant des transferts pour les familles.

Or, les transferts sociaux représentent dans leur ensemble le tiers du revenu disponible des ménages (revenu hors impôt direct) (1). Cela signifie que les efforts de la nation en faveur de la famille représentent désormais environ 3 % du revenu disponible des ménages. Autant dire une somme négligeable. Voici le résultat d'un appauvrissement continu de l'esprit du Code de la Famille de 1939. Cet appauvrissement se constate par l'effondrement du pouvoir d'achat relatif des prestations familiales (2). C'est l'effet de modifications structurelles d'un système remplaçant une politique de compensation par une politique d'assistance comme nous l'avons montré dans La France Ridée (3). C'est enfin l'effet d'un système déficient de représentation des familles. Dans une société où s'exercent des rapports de force entre les groupes sociaux, ceux qui n'ont pas la possibi-lité ou la capacité de faire valoir avec suffisamment de poids leur défense ne comptent pas.

Changements

Le second changement important intervenu concerne l'évolution de la sociologie de la France. La France des années quatre-vingt n'est plus celle de 1939. Une politique familiaie adaptée à son époque ne peut plus être seulement le Code de la Famille de 1939. Deux chiffres peuvent illustrer cette nécessaire mutation. D'une part, le triplement du niveau de vie des Français – tandis que stagnaient les prestations familiales – d'autre part, le changement spatial des Français.

En 1936. tandis qu'une poignée d'éminents Français élaboraient le Code de la Famille. la population urbaine représentait 52,4 % de la population de la France, la population rurale (4) 47,6 %. Trois décennies ont apporté de profonds changements à cette répartition moitié-moitié. Les migrations des campagnes vers les villes se sont développées, tandis que les actifs agricoles hommes passaient de 4 042 000 en 1946 à 1 416 000 en 1975. La population rurale est devenue aujourd'hui une minorité(27,1% au recensement de 1975) tandis que la plupart des Français vivent dans des villes.

Un projet familial nouveau doit tenir compte de ces changements. Il doit souligner l'importance de prendre des mesures qui permettent à une population urbaine de baigner dans une liberté familiale. Car, dans une société où la contraception est plus facile que la conception, dans une société où le refus de l'enfant est mieux remboursé que son accueil (5), la liberté familiale est véritablement une liberté à conquérir.

Pour être réelle, cette liberté doit pouvoir exister dans le triple environnement que nous présenterons plus loin : l'environnement physique – le cadre de vie – l'environnement médiatique – l'information et en particulier la place de la télévision – l'environnement affectif – un milieu de vie plus humain.

La liberté familiale appelle une place reconnue pour la famille dans la commune. Son respect suppose une intelligence nouvelle des compagnons de la famille que sont les outils audiovisuels.

En troisième lieu, la possibilité donnée à chacun de s'épanouir nécessite des aménagements pour préserver le droit de chacun à l'affectivité dans sa vie quotidienne.

Pour l'enfant, pour la famille, la commune doit être accueillante. Une ville qui est ouverte à la vie est une ville qui construit son avenir. Une commune qui ne prend pas en compte les problèmes
propres aux familles est une commune qui oublie de se préoccuper de son devenir.

Attitudes Irresponsables


A ce titre, l'année 1982 a mis en évidence des attitudes peu responsables. En effet, les premiers résultats du recensement de 1982 ont montré des diminutions de la population dans la plupart des grandes villes. Dans le même temps, les résultats ont corrigé les erreurs des évaluations inter-censitaires qui avaient exagérément majoré la diminution démographique dans certaines villes comme Paris.

Et soudainement, quelques maires, élus ou réelus en 1977, ont découvert l'importance de la démographie, après cinq ans de mandat et au moment de le terminer. Que n'avaient-ils compris qu'une commune, c'est d'abord une population et un territoire (6). Mais, Ils n'ont découvert la démographie qu'à travers des craintes budgétaires. En effet, les résultats du recensement s'exercent directement sur les finances locales : le chiffre de population détermine principalement la répartition de la dotation globale de fonctionnement; il détermine également le nombre de conseillers municipaux, la rémunération du maire, celle du secrétaire général, (7).

Des maires qui auraient pu suivre la baisse des naissances dans leur ville, essayer d'y porter remède, n'ont rien trouvé de mieux que de critiquer l'organisme recenseur – l'INSEE – quand celui-ci leur a annoncé une diminution de leur population en 1982 par rapport à 1975. Certes, Ie recensement ne peut être parfait et ne peut comporter une exactitude sans failles. Mais c'est une attitude peu responsable de se contenter de critiquer le travail de l'INSEE quand celui-ci annonce un chiffre déplaisant pour les finances de sa commune. Il vaudrait mieux s'informer tout au long de son mandat des réalités démographiques et se rappeler que le maire est le premier responsable de la surveillance des opérations de recensement dans sa commune.

A travers cette péripétie de l'année 1982, on comprend combien la famille est souvent insuffisamment prise en compte dans les communes. Les habitants détenteurs du droit de vote ont plus d'importance que ceux qui n'ont pas de droit de vote, tels les enfants des familles. Ces derniers comptent pourtant dans la population et représentent les forces vives du futur de la commune.

La société doit donc avoir une considération particulière pour les familles, qui élèvent le pays de demain. Cette considération nécessite que les politiques au niveau gouvernemental comme au niveau des communes, des régions, des départements mais également les politiques des institutions comme les offices de logement, les centres culturels, les transports publics agissent dans le respect et la reconnaissance du fait familial.

Un triple environnement

L'être humain doit être considéré dans le triple environnement dans lequel il vit. Il se meut, en effet, au milieu d'un espace à trois dimensions.

Le cadre matériel, c'est l'environnement physique qui l'entoure, dont le caractère peut être plus ou moins agréable ou plus ou moins pratique selon le parti qui a été fait des logements et de l'urbanisation.

Le cadre informatif est une seconde dimension. C'est pour beaucoup la télévision devant laquelle chaque Français, chaque Française, chaque enfant, passe en moyenne un temps quotidien non négligeable. Est-il besoin de rappeler que l'on considère que 80 % des Français regardent les actualités quotidiennes à la télévision. Mais ce circuit d'information comprend aussi les radios –
radios d'État ou radios libres– les jeux, les conversations à l'école, les vidéos-cassettes pour ceux qui possèdent un magnétoscope, les magazines, le cinéma, la presse...

J'utiliserai pour tout cela, une expression qui ne me satisfait pas mais permet de synthétiser le circuit d'information dans lequel l'être humain baigne. Je parlerai de l'environnement médiatique dont l'influence sur l'être humain est importante.

En troisième lieu, il convient de ne pas oublier l'un des besoins essentiels de l'homme, le besoin d'affection. L'être humain ne peut trouver son équilibre que dans un environnement affectif répondant à son attente. L'enfant, en particulier, a un besoin d'attachement essentiel pour son épanouissement.

Un projet familial adapté à notre temps doit donc être capable de rendre humain le triple environnement des familles: environnement physique, environnement médiatique et environnement affectif.

Une erreur historique

L'environnement physique a été mal pris en compte. La théorie voulait alors que le progrès nécessitât automatiquement la concentration. Toute une politique de désaménagement du territoire consista à encourager les familles à s'installer aux portes des grandes villes. Bien sûr, pendant tout ce temps, on assista à une baisse importante de la population rurale, fournissant une main-d'œuvre précieuse au développement de l'industrie. Mais la politique dite des "métropole d'équilibre" accentua la tendance. Les grandes villes pillèrent aussi les villes moyennes. Elles construisirent dans la précipitation des logements où des populations rurales se trouvaient déracinées, isolées, déséquilibrées, Et les cités-dortoirs ne sont pas un cadre de vie satisfaisant pour les familles.

Grâce à une réflexion sur les erreurs de l'idôlatrie de la dimension, la tendance fut renversée au début des années soixante-dix, non sans mal. Condamner l'excessive concentration urbaine, le pillage humain des campagnes apparaissait auparavant comme un acte inutile. L'opinion des décideurs était faite : ceux qui, comme moi, osaient porter de telles condamnations, étaient rejetés sous prétexte qu'iis n'étaient pas dans le sens de l'histoire.

Autrement dit, la réalisation de "cabanes à lapins" propres à loger les familles, était acceptée comme une sorte de déterminisme historique. L'installation d'usines, d'ateliers, de bureaux à la campagne apparaissait utopique.

Quand il apparut que la France était aussi un pays de villes moyennes à vivifier, et non à étouffer, il était trop tard. Les erreurs d'urbanisation se paient encore aujourd'hui. L'insécurité, la délinquance, les drames familiaux sont en partie les conséquences de ces erreurs. Et la réalisation de squares, de jardins publics, qui viennent plusieurs années après la construction de tours, donner un peu de chaleur à un environnement triste, ne peut corriger toutes les erreurs passées.

Pour demain, ces faux pas du passé nous montrent les voies à ne pas suivre. Ils indiquent la politique d'environnement physique que l'on doit promouvoir à trois niveaux.

Repenser les logements

Le logement appelle une politique anti-malthusienne. L'aménagement des espaces communs doit se faire au service des hommes. Enfin, le cadre de vie doit répondre aux besoins de loisirs variés de ses habitants.

Une véritable politique familiale du logement doit se rappeler que l'être humain est à la fois un être individuel, un être familial et un être social. Etre individuel, l'homme a besoin d'avoir des espaces personnels, ce qui signifie une pièce, une chambre pour chacun. Etre familial, l'homme a besoin de lieux où il peut vivre avec les autres, comme la salle de séjour ou la cuisine. Etre social, l'homme a besoin de lieux où il puisse rencontrer d'autres hommes, ou s'adonner avec d'autres à des activités associatives.

Satisfaire cette triple nécessité appelle une révision complète de l'état d'esprit malthusien qui semble présider aux politiques de logement. Donnons-en quelques exemples concrets. Les offices d'HLM publient périodiquement des statistiques sur le nombre de logements qu'ils gèrent ou qu'ils construisent. Or, ces statistiques sont toutes iInexactes. Elles indiquent, en effet, des nombres de logements, critères qui n'a aucune signification pour les familles. Dans ces statistiques, les deux-pièces est compté de la méme façon que le cinq ou six pièces. Il reste donc indispensable, pour connaître la réalité, de changer ces chiffres et de publier des statistiques en tenant compte du nombre de mètres-carres par appartement.

Autre exemple, le nombre d'immeubles construits ces dernières années, sans rampe à landaux ou à poussettes, est considérable. Il y a même des immeubles ou il est interdit a la fois de prendre l'ascenceur avec un landau et de laisser un landau dans l'entrée.

Les cuisines, lieu de vie familiale important, sont également négligées. On a vu de grands architectes, mondialement connus, concevoir la cuisine comme la pièce la plus petite et la plus sombre des immeubles alors que toute famille sait que c'est une pièce dans laquelle on vit beaucoup. Pour être précis, disons qu'une famille a besoin d'une cuisine d'au moins douze mètres-carrés et qu'on ne devrait pas concevoir des cuisines d'une superficie inférieure dans les appartements familiaux.

Les communes et les départements peuvent moduler les taxes d'habitation selon les charges de famille. Cet abattement est égal – pour chacune des deux premières personnes à charge – à 10 % de la valeur locative moyenne des habitations de la commune. Pour chacune des personnes à charge suivantes, à 15 % de cette même valeur locative moyenne. Ces taux peuvent être majorés de 5 points ou de 10 points par le Conseil Municipal, qui peut donc les porter de 10 % à 15 % ou 20 %, de 15 % à 20 % ou 25 %.

Dans un pays qui doit prendre en compte ces familles, toutes les collectivités locales devraient appliquer la majoration maximale, qui répond à l'equilibre-famille

Il devrait étre possible de prévoir des conventions entre les offices de logement et ceux qui participent à leur financement : ces conventions prévoiraient la réalisation minimum d'appartements de dimension suffisante, l'aggrandissement des appartements à l'occasion de rénovation, la mise en place d'agencements extérieurs pour les familles, l'élaboration de politiques de loyers tenant compte de critères familiaux, la concrétisation d'une politique architecturale permettant une souplesse d'habitation avec l'imbrication d'appartements moyens et de chambres dont l'adjonction ou la séparation sont possibles (8)...

Tout ceci ne peut se réaliser en un jour, mais appelle un état d'esprit nouveau, une conception dynamique de la politique du logement, une lutte permanente contre l'esprit de rigidité pour que le droit de chaque être a un logement puisse s'exercer.

Aménagements urbains

L'aménagement du cadre urbain est complémentaire de celui du logement. La cité est l'espace de base le plus adapté pour mener une politique familiale. L'enfant doit pouvoir s'épanouir en toute sécurité dans son quartier, dans sa commune, comme dans son logement.

L'enfant se forme en interaction avec son environnement physique. Il doit pouvoir découvrir librement cet espace. Pour cela, si la voiture doit avoir sa place, elle ne doit pas avoir toute la place, ni bénéficier a priori d'une priorité systématique. De nombreuses actions sont possibles pour que le cadre urbain soit accueillant et sécurisant pour les familles.

L'agencement des bâtiments publics pour les rendre accessibles aux landaux et aux poussettes est un exemple ; l'élargissement des trottoirs à la sortie des écoles en est un autre ; la réalisation de cheminements pour les piétons et pour les vélos est une troisième nécessité.

Des commissions municipales ou extra-municipales peuvent étudier les moyens d'aménager les routes et tout particulièrement les endroits dangereux afin d'améliorer la sècurité des enfants. Une amélioration de la signalisation, notamment à l'approche des écoles, est possible. La reconquête des trottoirs, la réalisation de systèmes de ralentissement de la vitesse des voitures dans des points où la sécurité des piétons est en danger sont essentiels pour que les familles puissent vivre dans un espace de liberté et non dans un enfer d'insécurité et de bruit. Les trottoirs sont pour les familles un lieu de vie, parfois à reconquérir, souvent à élargir pour permettre la libre circulation.

Cette libre circulation passe également par des politiques justes en ce qui concerne les transports publics. Quand des villes accordent la gratuité des transports en commun à tous les habitants âgés de plus de soixante-cinq ans, est-il logique que les enfants et les adolescents, de quatre à dix-huit ans, supportent un tarif normal ? Quand on institue dans une région un système de carte orange, est-il logique que l'on refuse dans le même temps d'instituer un abattlement de la carte orange pour les familles ?

Ne peut-on envisager d'ouvrir au public des jardins abandonnés ou peu utilises avec, en contre-partie, des engagements de la ville de les entretenir ? Ne peut-on imaginer que les cours d'écoles, abandonnées le dimanche, puissent alors servir d'espaces de jeu ? Ne peut-on faire en sorte que des terrains, temporairement libres ou à l'abandon, soient utilisés comme terrains d'aventure ?

L'être humain a besoin pour s'épanouir d'un milieu de vie ou il se sente accueilli. L'environnement matériel des familles doit remplir son rôle de regroupement, de protection, d'ouverture permettant la créativité et la spontanéité.

Des informations perturbatrices

Les familles, outre la sphère physique dans laquelle elles vivent, sont également prises dans une sorte de tourbillon d'information. Volens nolens, les familles sont des récepteurs d'informations d'images qui leur parviennent de toute part. Des informations, des images sont précieuses et utiles pour les familles. D'autres viennent les pertuber. D'autres, enfin, sont insuffisantes.

Dans ce que j'appelle l'environnement médiatique des hommes, il y a les télévisions, les radios, la presse, l'école,... dont les excès viennent souvent culpabiliser les familles.

Telle publicité fait comprendre aux parents que, s'ils n'achètent pas ce jouet éducatif miraculeux pour leur enfant, celui-ci sera un imbécile au lieu de devenir un génie.

Telles informations font croire que pour bien se connaître et bien connaître son enfant, il faut au préalable, recueillir l'avis du médecin, de l'assistante sociale, du psychologue, du psychiatre, du conseiller d'orientation, de l'orthophoniste, du rééducateur, en psychomotricité, etc.

Au sortir de toutes ces consultations que l'on présente comme indispensables, les familles font parfois des découvertes de bon sens présentées comme sensationnelles : les enfants ne sont jamais parfaits, ils sont souvent malades, égoïstes, parfois repliés sur eux-mêmes, ou contestataires, agressifs, gêneurs...

L'énvironnement informatif peut ainsi contribuer à détruire l'équilibre précaire que chaque famille essaie de construire tous les jours. D'ailleurs certaines émissions de radios savent sonner le glas: « comment, vous voulez élever des enlants, sans mêne avoir subi une psychanalyse !  ». Ces quelques rappels montrent combien l'Information peut avoir des effets perturbateurs.


Promouvoir une image positive

Pour y pallier, il ne s'agit pas d'obliger les médias à ne pas parler des problèmes posés par l'éducation, mais il s'agit aussi de donner la possibilité aux familles de s'exprimer pour rappeler, par l'exemple, des vérités très simples comme celle-ci : les meilleurs spécialistes de l'éducation des enfants sont encore leurs proches et les spécialistes, cités ci-dessus, en peuvent être que des conseillers, non des substituts à une éducation patiente et quotidienne.

Toute une série d'actions qui concerne les familles, les médias et les collectivités publiques, est possible pour contribuer a créer un environnement informatif moins agressif a l'égard des familles. Il appartient aux mouvements famillaux de présenter une image positive aux medias, pour que ceux-ci véhiculent le fait familial, tel qu'il est vécu tous les jours, avec l'importance de son caractère gratifiant et aussi avec les petites difficultés qu'une société plus accueillante doit aider à résoudre.

Les pas timides faits en France pour donner un peu de liberté aux médias devront être plus grands. Mais ce pluralisme souhaitable des radios et télévisions suppose que puissent s'exprimer tous les courants de la société. Dans l'attribution des fréquences radio, doit-on privilégier une radio gay, selon l'expression actuelle, c'est-à-dire une radio pour un mouvement homosexuel, ou une radio pour un mouvement familial ? Doit-on privilégier une radio pour les propriétaires de chiens ou une radio pour un mouvement familial ? Il appartient aux autorités, en répondant à ces questions, de mettre en évidence l'aide qu'une société équilibrée doit apporter à la vitalité de ses familles.

Chacun a pu constater que l'année 1982 a étécelle d'une sorte de découverte pour les partis politiques, pour ceux de l'opposition comme pour ceux de la majorité. Le Président de la République en premier, le Gouvernement, les manifestes électoraux de l'opposition ont affirmé avec une insistance particulière la nécessité d'encourager les entreprises, la création d'entreprises et l'esprit d'entreprise pour que la France puisse avoir une économie assez forte au service de sa population.

En ce qui concerne les familles, une prise de conscience semblable est nécessaire. La vitalité d'une société, l'équilibre d'une société dépendent du fait familial qu'il serait temps de reconnaître comme une micro-société fondamentale qui apporte à l'homme, pris entre l'isolement de l'individu et son écrasement par l'importance de l'État, une dimension vitale.

Des "spots" familiaux

Cette reconnaissance passe par la possibilité pour les mouvements familiaux d'être présents sur les médias. De nombreuses formules pratiques peuvent être envisagées. L'existence, évoquée ci-dessus, de radios locales familiales est une premiére possibilité. La réalisation d'émissions plus familiales peut être envisagé soit à la libre initiative d'hommes de télévision, soit sur les conseils de mouvements familiaux, soit encore avec "appui logistique de mouvements familiaux." Il serait facile de développer le système de la tribune libre instituée trop modestement sur FR3, système qui permet aux associa1ions de s'exprimer.

La création de commissions familiales chargées du suivi des médias serait précieuse. Ll'actuel Comité Consultatif de la Famille, qui comprend une majorité de représentants de l'Administration, devrait être redéfini, réactivé et redéployé pour contribuer à cette tâche. Il faut également le repenser compte tenu de l'évolution même des médias : radios libres, radios locales, vidéo-cassettes...

Bénéficiant d'un rôle consultatif, elles pourraient porter à la connaissance du public leur point de vue sur les émissions réalisées, sur ce qu'il serait souhaitable de promouvoir. Elles proposeraient des initiatives nouvelles. Elles auraient, en vertu de cahier des charges, la possibilité de susciter, à côté des habituels spots publicitaires, des "spots familiaux" informant les familles des problèmes qui les concernent : éducation, santé, culture, jeux, sports, mais également petits conseils d'organisation, besoins de sommeil des enfants...

Pour des citoyens actifs


Ces commissions, dans le cadre de tribunes libres par exemple, pourraient expliquer aux téléspectateurs ce qu'est la télévision et comment elle se fait. En effet, il est toujours utile d'expliquer aux citoyens les techniques audiovisuelles. Et, d'autre part, une meilleure compréhension du fonctionnement des médias développerait l'esprit critique de chacun et permettrait une meilleure estimation des émissions, si chacun pouvait apprendre à écouter et à regarder.

Une télévision libérée peut être une télévision inventive. A la télévision française, une des émissions les plus indépendantes est en réalité une émission qui donne le goût de pratiquer une autre activité : la lecture. En effet, la fameuse émission sur les livres du vendredi soir est, en fait, un véritable levain de la lecture.

De même, il est possible de promouvoir des émissions donnant lie goût de pratiquer des activités alternatives au spectacle – souvent passif – de la télévision : bricolage, jeux, mimes, jeux de rues, activités de plein air...

Dans ce but, une personnalisation est souvent nécessaire. Chacun sait que Borg, avec l'appui des médias, a déclenché un développement considérable du tennis. Pourquoi ne pas imaginer demain un Borg du bricolage, un Borg des jeux d'enfants, un Borg des jeux de rues, et aussi un Bernard Pivot de la lecture pour les enfants, un Bernard Pivot de la lecture pour les adolescents...

Un développement des émissions qui donne au télespectateur un rôle participatif et pas seulement un rôle passif est également souhaitable.

Des feuilletons familiaux

Chacun peut également constater l'absence quasi-générale du fait familial dans les films et dans les feuilletons. le ministère de la Défense réalise ou participe régulièrement à des émissions pour montrer comment les armées consacrent leurs activités à assurer l'indépendance de la France. En l'absence d'initiatives de réalisateurs dotés de la sensibilité nécessaire, ou de mouvements familiaux, on pourrait souhaiter que des organismes, comme par exemple, les Caisses d'Allocations Familiales ou la Caisse Nationale d'Allocations Familiales, à défaut le ministère chargé de la Famille, apportent une contribution à la réalisation de feuilletons familiaux contemporains ou de films dans lesquels ont voit vivre des familles d'aujourd'hui.

Ces contributions seraient peut-être plus utiles que le financement de certaines recherches théoriques mal définies, mal orientées, mal exploitées et dont les résultats se situent parfois totalement en dehors des réalités du vécu quotidien des familles. Les familles ont besoin de se voir pour mieux se connaître. Ce serait précieux pour elles de se regarder dans les médias, dans des films ou des téléfilms où l'on verrait vivre des familles modernes, confrontées aux réalités de la vie économique et sociale.

Tout cela montre qu'une réflexion de fond s'impose sur la famille et les médias (prolongeant le rapport de Maurice Dousset de février 1981) en prenant en compte les changements actuels et à venir de l'environnement médiatique, tel le développement des vidéo-cassettes et demain de la télévision par câbles.

Pour cette prise en compte, un autre élément essentiel du circuit d'information dans lequel baignent les familles ne doit pas être oublié : c'est l'école. Celle-ci ne doit pas devenir un grand spectacle audiovisuel. Mais elle doit utiliser les techniques audiovisuelles quand elles contribuent à l'éducation. Dans le même temps, la formation de tous, et particulièrement des jeunes, aux médias, demeure indispensable.

Des publicités discutables

Dans l'environnement médiatique, il convient de ne pas oublier les publicités. Nous avons montré, à l'aide d'exemples, combien la famille est très peu représentée dans la publicité, et quand elle existe, combien elle est restreinte (9). Il y a notamment ce logos créé par l'administration, que l'on peut voir dans quinze mille bureaux de postes et sur des millions de documents publicitaires. C'est le logos de la Caisse Nationale de Prévoyance. Il symbolise la prévoyance par une famille comprenant le père, la mère, un enfant et deux parapluies. Le démographe peut affirmer que deux parapluies ne pourront jamais empêcher une nation d'enfants uniques de subir les effets du vieillissement, de la dépopulation et du déclin de la vitalité. Un État qui instaure une politique familiale moderne doit donc déjà balayer devant sa porte. Il lui est facile de faire en sorte que les publicités des ministères et des administrations prennent en compte le fait familial. Or, ce n'est pas le cas comme le prouve notamment la principale affiche de la campagne 1982 du ministère du Temps libre ou la publicité 1982 pour les bons du Trésor (10).

Mais il faut aussi que les pouvoirs publics et les mouvements familiaux développent un rôle incitatif sur les publicités privées.

En août 1980, la société General Motors publie, dans toute la grande presse, une double page dont l'une représente une Opel Ascona avec un couple et un chien sur une plage. Un slogan accompagne ce couple et ce chien: "Opel, l'esprit de famille" ! Face à une présentation aussi discutable, ne pourrait-on imaginer une sorte de campagne ou une sorte de droit de réponse tournant en ridicule le publicitaire. Car le stéréotype de l'animal domestique, utilisé comme substitut, est difficilement acceptable.

Il n'est pas question de définir aux publicitaires, qui sont et doivent être des professionnels libres, des normes obligatoires. Celles-ci n'auraient d'ailleurs aucun sens, car il s'agit non de privilégier tel type de famille par rapport à tel autre, mais de susciter un pluralisme de la représentation familiale. Par une action quotidienne pour le faire connaitre, tous ceux qui veulent promouvoir le fait familial peuvent suggérer des idées élargies aux publicitaires.

A travers ces différents éléments, chacun perçoit l'importance du cadre informatif des familles. En particulier, la télévision ne doit pas étre un simple instrument de consommation béate ou éloignée de la vie réelle, au risque d'accroître le désengagement social des télespectateurs. Dans une sociétédémocratique et humaine, les différents médias n'ont pas pour rôle de se substituer aux relations interpersonnelles avec l'entourage. Ils doivent au contraire, permettre d'accroÎtre le réseau des échanges interhumains, notamment au sein de l'univers familier. Ce qui implique est extension des espaces de liberté.

Nous proposons donc un cadre de vie pour les familles, plus accueillant, plus solidaire, plus fraternel et in fine, plus humain. Pour cela, il faut concevoir d'une maniére adaptée aux années 1980. C'est une conception totalement renouvelée de la politique pour les familles qui s'impose.

Nous avons trop vécu sur les acquis du Code de la Famille de 1939 comme si celui-ci était une bible qui ne nécessitait pas d'adaptation. Nous avons trop accepté de mettre en lambeau, pièce par pièce, certains éléments qui contribuaient à une plus grande justice à l'égard des familles. Nous continuons d'accepter, parce que les familles ne sont pas un groupe social suffisamment mobilisé, que toute politique d'austérité commence par se faire sur le dos des enfants et des familles.

Cette attitude irrespectueuse et ce manque de considération de la société vis-à-vis des familles, qui contribuent pourtant à sa survie, est terriblement scandaleux.

Aujourd' hui, un grand sursaut est nécessaire. La contribution hautement positive des familles à la vie doit être reconnue dans toute son ampleur, et respectée dans toute sa valeur. Mais cela ne sera que si les familles françaises savent parler haut et fort de ce qu'elle sont, de leur rôle fondamental de levain de la société, de leur contribution à l'épanouissement du monde de demain. Dire que la famille est la cellule de base de la société ne suffit pas. Il faut aussi provoquer toute occasion pour le montrer.

Pour la vie, pour les enfants du futur, pour ne pas être écrasés par le double rouleau compresseur de l'individualisme exacerbé et de la massifi-cation étouffante, pour bâtir ensemble l'espérance de demain, mobilisons-nous.

(1) 32,4% en 1980, soir 655 milliards de francs contre 24,7 % en 1970.
(2) Cf. APRD-Information n° 5. 4ème trimestre 1978.
(3) Gérard-François DUMONT et alil. La France Ridée, Hachette, collection Pluriel, 1979, p. 254 et ss.
(4) Population des communes de moins de 2 000 habitants agglomérées.
(5) Jean LEGRAND, Le Quotidien de Paris, 27 décembre 1982.
(6) Cf. la collaboration de Gilbert GAUER à l'Enjeu Démographique, Editions de L'APRD, 1981, p. 40 et ss. (7)Cf.: Gérard-Frençois DUMONT et alii, La Tragédie deFrance, Economica. 1983. p. 110 et 55.

(8) Cf. Gérard-François DUMONT. La Tragédie de France, Economica et édiditions de l'APRD, 1983.
(9) Cf. Gérard-François DUMONT et alii, La France Ridée, Hachette, collection Pluriel, 1979.
(10) Cette publicité, parue dans de nombreux périodiques comme Le Nouvel Economiste du 15 novembre 1982, montre la famille idéale pour le Tresor Public: le père, la mère et l'enfant unique d'une dizaine d'années. L'observateur notera que les deux parapluies de la Caisse Nationale de Prévoyance sont remplacés par trois paires de bottes. L'argument est le suivant: « Les économies d'aujourd'hui pour bien vivre demain ». serait facile de rappeler qu'un pays sans enfant est un pays sans avenir. Faire des économies d'enfant (comme sur le dessin de la publicité) n'est absolument pas un "placement sûur", contrairement à l'affirmation affichée.

© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, novembre 1983

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