C'est
avec une peine profonde que je prends la parole ce soir, car ce
que je vais vous dire pour commencer est profondément triste.
Je l'ai dit, il y a une semaine à l'Académie
Pontificale des Sciences : la défense de la vie a perdu
son plus grand champion, Sir William LlLEY. Vous ne le
connaissiez peut-être pas, vous ne connaissez peut-être
pas son nom, mais tout ce que vous connaissez sur le commencement
de la vie, c'était à lui que vous le deviez. Sir
William LlLEY est un néo-zélandais, un homme extrêmement
vigoureux, taillé en hercule, musclé, joueur de
rugby, et qui a fait une carrière extraordinaire : d'abord
neuro-biologiste, il devint accoucheur, pour protéger les
enfants des risques de la naissance. On lui doit d'avoir découvert
l'amniocentèse. Sir LlLEY s'occupait des enfants qu'une
incompatibilité rhésus met en danger parce que la
mère produit des anti-corps capables de léser les
cellules de l'enfant, spécialement les globules rouges ;
il eut l'audace, le premier, d'employer une grosse aiguille pour
perforer la paroi abdominale de la mère, traverser la paroi
de l'utérus, et prélever du liquide amniotique,
pour examiner l'état de l'enfant. Si l'enfant était
très malade, on pouvait provoquer tout de suite un accouchement
précoce, vers 7 mois, pour transfuser l'enfant et le sauver.
C'est secondairement que LlLEY eut le courage, je dois dire, terrible,
non seulement de percer la demeure de l'enfant, mais de perforer
l'abdomen de l'enfant lui-même, et d'insérer un minuscule
tube de plastique, il l'intérieur de l'abdomen du petit
bonhomme qui continue il gigoter, pour lui faire une transfusion
sanguine et le sauver in-utero. Il fallait un courage,
une détermination, une adresse, une sûreté,
que seul au monde LlLEY possédait à l'époque.
C'est lui qui a inventé donc l'amniocentèse pour
guérir les enfants. Il a été plus loin :
c'est à lui que nous devons de connaître que les
bébés ont le hoquet : ceux qui sont des gourmand.
se donnent le hoquet en avalant trop vite le liquide amniotique,
et ce sont les mêmes qui ensuite sont des insatiables, quelques
mois plus tard dans le nursery. Inversement, ceux qui n'ont jamais
le hoquet sont des petits chipoteurs qu'on a beaucoup de peine
il élever ! Sir William LlLEY avait découvert
cela in-utero. Il avait découvert aussi que l'enfant
goûtait, lorsqu'on injecte un produit amer dans le liquide
amniotique, l'enfant refuse d'avaler, alors que, au contraire,
si on injecte un produit sucré dans le liquide amniotique,iI
avale beaucoup plus souvent que d'habitude... et se donne le hoquet
bien entendu. LlLEY a été le fondateur de la pathologie
de l'enfant et du traitement de l'enfant in-utero. La Reine
d'Angleterre l'a anobli, mais la Médecine l'avait anobli
bien avant, en reconnaissant en lui le père de la ftologie
moderne.
Si
je vous ai raconté un jour l'histoire de Tom Pouce, ce
n'était pas une fantaisie, c'était sur les travaux
de LlLEY que je l'avais établie. Sir LlLEY est mort, et
une petite fille de 6 ans pleure aujourd'hui son père adoptif.
Cette petite fille est trisomique 21. Sir William LlLEY et Lady
Margaret avaient déjà 5 enfants, lorsqu'un jour
une maman abandonna dans le service de Sir LlLEY une petite
fille mongolienne. Les LlLEY l'adoptèrent et cette petite
fille est maintenant une petite LlLEY, elle pleure aujourd'hui
le malheur qui lui a enlevé son protecteur et tous les
enfants en danger, s'ils savaient que Sir William est mort, auraient
pleuré aussi.
Nous
avons souvent discuté ensemble. La dernière fois
que je l'ai vu, c'était 15 jours avant sa mort. c'était
au Canada à Régina. Nous étions la pour témoigner
devant la justice canadienne, pour dire que l'être humain,
dès son commencement est un être humain, et nous
avions discuté des déviations de la science. LlLEY
avait inventé l'amniocentèse, pour sauver les enfants,
et vous savez comment cette technique a été employée
ensuite pour dépister des maladies et pour proposer de
tuer les enfants, au lieu de les soigner ! LlLEY souffrait profondément
d'avoir été le pionnier, qui par la découverte
d'une technique utile pour soigner, voyait détournée
de son but une découverte remarquable. Quand nous en parlions,
j'éprouvais le même sentiment. Lorsque j'ai vu pour
la première fois le chromosome 21 en trop chez les trisomiques,
c'était un signe de maladie, et depuis certains en ont
fait un signe de mort. Sachez que la science et la technique peuvent
toujours être détournées de leur but naturel
qui est celui de la protection et du bien-être des hommes.
Il n'y a qu'un seul remède, et c'est celui que Sir LlLEY
a employé toute sa vie : exprimer directement la vérité
sans arrêt et partout. Il a été certainement
le meilleur orateur en faveur de la vie. Il a parlé sur
tous les continents, dans tous les milieux. Sir LlLEY se dérangeait
pour 20 personnes, pour leur expliquer ce qu'il y avait dans le
ventre d'une maman, et que le petit être qui se développait
n'était pas un homme imparfait, mais était véritablement
un bébé merveilleusement fonctionnel.
Il
n'avait que 54 ans quand il nous a quittés, et personne
au monde ne peut prendre la place qu'il tenait, il nous reste
a suivre son exemple, c'est le plus grand hommage que nous puissions
rendre a sa mémoire.
Le
respect de la vie a une importance extrême et vous tous,
nous tous, ses défenseurs, nous sommes beaucoup plus importants
que nous ne le croyons nous-mêmes.
Laissez-les-Vivre
S.O.S. Futures mères intéresse, semble-il,
beaucoup de gens, pour des motifs assez divers, il est vrai. Permettez-moi
de vous en donner deux exemples récents.
Vous vous souvenez certainement d'une affiche apposée dans
tout Paris, qui fit quelque bruit a l'époque: un ftus
de deux mois a peu près, vêtu d'un très petit
pantalon: un jean comme on dit. L'affiche ne portait qu'un seul
slogan: "taillé pour l'aventure".
Cet
événement publicitaire me valut un entretien a la
Radio d'État, chose pratiquement impossible pour nous depuis
bien des années. Une personne très affairée
me téléphona pour m'enjoindre de porter plainte
au nom de Laissez-les-Vivre contre les auteurs de cette
affiche, la marque Wrangler: il s'agit en effet, me dit cette
personne, « d'une exploitation scandaleuse des ftus
humains ».
J'avoue
que j'éclatais de rire, ce qui la bouleversa grandement.
En effet ce petit bonhomme, fort réussi, n'était
nullement un produit d'avortement, mais bien une représentation
assez exacte de l'aspect que chacun de nous présente dans
son extrême jeunesse.
J'avouais
à cette personne que je trouvais très cocasse d'affubler
ce petit homme d'un pantalon dont il n'avait nul besoin, protégé
qu'il était dans le sein de sa mère. J'ajoutais
même que la légende me paraissait fort appropriée
: si quelqu'un est bien "taillé pour l'aventure",
n'est-ce pas ce petit homme qui s'apprête a l'extraordinaire
aventure de la vie !
Mes
déclarations téléphoniques parurent si choquantes,
tellement contraires à l'image de marque qu'on prétend
nous imposer qu'une équipe vint sur le champ enregistrer
ces assertions scandaleuses et les passa immédiatement
sur les ondes !
Mon
seul regret est que cette affiche ne soit pas reposée périodiquement.
Jamais, bien entendu, nous n'aurions pu nous permettre un tel
luxe, en quadrichromie, mais c'est très heureux que des
publicistes aient enfin compris ce que nous a enseigné
Sir William LlLEY et ce que nous répétons inlassablement,
c'est-a-dire un petit homme est un homme.
Comme
vous le voyez, votre dévouement excite bien des convoitises ;
et cela m'amène à la seconde histoire qui s'explique
beaucoup moins aisément que la première. Vous savez
qu'il existe une multinationale de presse à laquelle notre
Président a fait allusion il y a quelques instants, et
qui édite en plusieurs langues, quatre au moins à
ma connaissance, en italien, en français, en anglais et
en allemand, des articles destinés, semble-t-il, à
répandre les opinions d'un politicien américain,
un certain Lyndon Larouche. Et les opinions de ce Lyndon
Larauche seraient transmises en France par Monsieur Cheminade,
qui en exprimerait les tendances par le truchement d'une organisation,
le Parti Ouvrier Européen. Ici, je vous dois un
aveu. Étant scientifique, et non politicien, je ne peux
guère vous expliquer de quoi il s'agit. Et, devant les
publications qui ont été citées tout à
l'heure, je dois vous dire que je me trouve un peu dans le cas
d'un entomologiste qui, étudiant les murs des fourmis
nourricières qui s'occupent du couvin et de la protection
de la progéniture, s'apercevrait tout d'un coup, qu'il
s'agit en fait de mantes religieuses dévorant leurs conjoints
! Vous savez, et une lettre vous a été envoyée
à tous, que ces différentes publications de cette
multinationale de presse: Ligue contre la drogue, Fusion,
Club de la vie, Eire, Nouvelle Solidarité,
et d'autres que je ne connais probablement pas, ont attaqué
plusieurs d'entre nous. La genêse de l'histoire est curieuse
et je pense que de plus qualifiés que moi pourraient peut-être
vous l'expliquer mais je ne puis que vous la raconter. J'ai reçu
un jour la visite du représentant en France de cette curieuse
organisation, le P.O.E., Monsieur Cheminade était
désireux que nous fassions une fusion, si j'ai bien compris,
(mais je le répète, ces matières sont obscures
pour un scientifique) entre Laissez-les-Vivre et S.O.S.
Futures-Mères d'une part, et une de ses associations
le Club de la Vie de l'autre. Comme il n'est pas dans ma
nature d'engager mes amis, sans leur avoir demandé leur
avis, et je pense qu'aucun membre de notre association ne peut
le faire, je ne pouvais prendre cette initiative. L'affaire en
resta là du moins je le crus, or, peu de temps après,
je reçus un coup de téléphone d'un monsieur
parlant américain, qui se présenta comme étant
un membre de l'organisation c!e M. Lyndon Larouche, et m'avertit,
en des termes extrêmement comminatoires que si je persistais
à répandre le bruit que leur organisation était
une émanation du K.G.B., ma réputation scientifique
Internationale serait détruite ! Quel rapport pouvais-je
avoir avec le K.G.B. dans leur esprit, je n'en sais rien,
mais peu de temps après une campagne commença; je
reçus de divers collègues anglais, italiens, allemands,
américains et espagnols, des coupures de journaux dont
la lecture était fort étrange. J'en possède
une collection très curieuse, quoique probablement incomplète,
mais je ne vous en infligerais pas la lecture. Je vous dirais
simplement pêle-mêle, ce que j'ai appris dans ces
publications multinationales :
que j'avais des amis nazis en Suède, des amis fascistes
en Espagne, des amis intégristes au Brésil, et des
malthusiens à Rome !
que j'étais une vipère du K.G.B. crachant
mon venin sur les armes à rayon !
que j'avais inventé la grossesse masculine !
que j'évoluais entre le 4e Reich de sinistre mémoire
et une 3e Rome dont je ne sais où elle se situe, et que
j'avais des amitiés douteuses avec les assassins du Pape
!
Il
semblerait même, mais ici l'exégése est difficile,
car le texte n'est pas très clair, il semblerait même
que j'aurais rencontré feu le Président Brejnev,
pour mettre au point avec lui les modalités de tentative
d'assassinat de la place St-Pierre, lequel attentat, je vous le
signale eut lieu 7 mois avant que le St-Père m'ait envoyé
en mission à Moscou avec l'Académie Pontificale
des Sciences !
Vous
comprendrez ma surprise de scientifique devant un phénomène
de ce genre : je me sens vraiment dans le sentiment de l'enttomologiste
découvrant une espèce inconnue. Mais je n'étais
pas au bout de mes étonnements. On citait aussi des vrais
amis, c'est-à-dire des gens que je connais et que j'estime
vraiment :
Mme POULLOT, tout d'abord, redoutable fasciste tentant
d'instaurer une révolution subversive en Espagne !
Le Dr. ERNST, d'Ulm en Allemagne redoutable raciste
ayant sa base secrète au Paraguay !
Le Révérend Pére Paul MARX,
accusé de menées obscures, bien que je n'aie pas
très bien compris de quoi Il s'agissait.
Enfin, mon illustre ami, le Pr CHAUNU, qui fomenterait
avec moi une agitation redoutable parmi les extrémistes
de l'Islam !
Alors,
à la réflexion, qu'avons-nous tous en commun : Mme
POULLOT, dont vous connaissez tous l'uvre admirable, le
Dr. ERNST, qui est le fondateur dans tous les pays de langue allemande
de l'association des médecins pour le respect de la
vie, le Révérend Père Paul MARX, qui
est certainement le plus vaillant champion de l'enfant à
naître aux États-Unis, le Pr CHAUNU qui est le plus
remarquable de nos historiens et de nos démographes, et
qui, lui-aussi, est un défenseur infatigable des enfants
à naÎtre. Qu'avons-nous en commun, eux et moi et
vous et nous tous ? Nous sommes des défenseurs de
la vie, et c'est un Club de la vie qui nous attaque !
Comprendre cela dépasse de loin les compétences
d'un scientifique, je vous l'ai déja dit.
Peut-être
un politicien prétendrait-il que ces gens sont en fait
nos alliés, puisqu'il se trouve qu'ils attaquent aussi
le malthusianisme et les opinions économiques du Club
de Rome. En politique, les adversaires de nos adversaires
sont nos alliés. Seulement, nous ne sommes pas des politiciens
et comme nous ne faisons pas de politique, nous n'avons pas d'ennemis,
et par conséquent nous ne pouvons pas avoir pour alliés
des ennemis de nos ennemis, puisque des ennemis nous n'en avons
pas. Il est possible que certaines personnes nous considèrent
comme leurs adversaires. Mais cela, c'est leur affaire. Ce n'est
pas la nôtre. Nous, nous n'avons qu'un adversaire : l'ignorance,
qui masque la réalité terrible du massacre des innocents
cautionné par la loi actuelle et nous n'avons qu'un argument,
la vérité.
Si
nous ne savions pas, de certitude absolue, que les petits des
hommes sont vraiment des hommes, Laissez-les-Vivre n'existerait
pas. Si nous ne savions pas de certitude absolue qu'il faut sauver
en même temps et la mère et l'enfant, S.O.S. Futures-Mères
n'aurait aucune raison d'être. Et si la vérité
est notre seul guide, alors ceux qui la bafouent sciemment ne
peuvent pas être nos alliés. En politique, il est
peut-être vrai qu'on choisit ses adversaires, je n'en sais
rien, mais quand on protège la vie, c'est ses amis qu'on
choisit.
Que
conclure de tout cela : une seule chose : n'ayez pas peur et vous
ne serez pas récupérés. Dans la vraie vie,
celle que nous défendons, c'est toujours la vérité
qui libère.
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, novembre 1983
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