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HISTORIQUE DE LAISSEZ-LES-VIVRE – SOS FUTURES MÈRES



IMPRIMERXIIe Congrès : EUROPE DE LA VIE
Déroute démographique de l'Europe et
inventaire des forces de relèvement :
La situation de la France

La France était jadis la première puissance démographique de l'Europe : vers 1800, au moment où Bonaparte prend le pouvoir, elle compte 30 millions d'habitants dans le cadre des frontières actuelles, dans une Europe qui n'en a au total que 146 (176 avec la Russie). C'est la force du nombre, plus encore que l'aptitude à manier les gros bataillons, qui explique les victoires de la Révolution et de l'Empire.

Or, au XIXe siècle, s'engage, à l'echelle européenne le processus de la "transition démographique". D'un regime de haute fécondité et de haritp mortalité, on va passer à un autre régime, àbasse fecondité et basse mortalijté. En règle générale, la chute de la fécondité et celle de la mortalité ne sont pas simultanées. Dans presque tous les pays qui sont affectés par la transition démographique, c'est la mortalité qui diminue la première, et la fé!condité ne suit qu'après une période plus ou moins longue ; au total, le processus peut s'étaler sur un siècle. Dans l'intervalle, si l'on considère la population comme un stock, l'écart entre le flux d'entrée (la fécondité) et le flux de sortie (la mortalité) dégage d'importants excédents, et la population peut être multipliée par 3, par 4 ou 5 ou davantage.

C'est ainsi qu'entre 1800 et 1914, la population de l'Autriche-Hongrie est passée de 20 millions à 51 millions d'habitants ; celle de l'Allemagne de 20 à 68 millions ; celle du Royaume-Uni de 14 à 45 millions ; celle de l'Empire russe de 30 à 168 millions.

En France, au contraire, la fecondité a baissé en même temps que la mortalité : entre 1800 et 1914, le nombre moyen annuel des naissances. (à territoire constant) est tombé de 960 000 à 790 000, celui des décès de 890 000 à 760 000. C'est seulement l'allongement de la durée moyenne de la vie humaine, et dans une moindre mesure, l'immigration qui a permis â la population de passer de 30 à 42 millions (toujours dans le cadre des frontières actuelles). Croissance bien modeste par rapport à celle de ses voisins : en 1914, elle ne vient plus qu'au 5e rang en Europe. L'équilibre des forces en est bouleversé. Ses dirigeants ne voient plus de salut que dans le système des alliances, mais ce système contribue à entraîner toute l'Europe dans la catastrophe de 1914.

Au cours de la première guerre mondiale, la France perd 1 350 000 de ses meilleurs fils – sans parler des invalides et des mutilés. Elle ne s'en remettra vraiment jamais, et on a pu écrire que « la défaite de 1940 était inscrite en filigrane sur les monuments aux morts de la guerre de 1914 ». Après un faible rattrapage en 1920-1923 (lié à Ia formidable poussée de mariages de 1919-1920), elle cesse de remplacer ses générations :en dépit de l'arrivée de millions d'étrangers, le nombre des naissance cesse d'équilibrer celui des décès à partir de 1935.

On touche le fond de l'abîme démographique en 194, avec 523 000 naissances pour 673 000 déicès. Or, brusquement, à partir de cette année-là, et en dépit de circonstances hautement défavorables (pénurie, insécurité, absence d'1 200 000 prisonniers), la fécondité commence à se relever, probablement sous l'effet des mesures natalistes inscrites dans le Code de la famille (1939) et confirmées par le Gouvernement de Vichy.

A la Libération,le nombre des naissances s'élève à un niveau qui n'a jamais été atteint depuis 1904 (871 000 en 1904, 844 100 en 1946).

On s'attendait a une brève flambée, Or, la poussée se prolonge et s'accentue : on atteint un premier record en 1949, avec 872 800 naissances, puis, après une légère baisse : 878 000 en 1964.

Et voila que brusquement, cette année-là, en pleine période de prospérité, et bien avant la "revolution culturelle" de 1968, la fécondité commence a baisser simultanément dans la plupart des pays occidentaux : c'est le debut du "baby-krach", qui s'accentue brusquement en 1975, l'année même où est legalisé l'avortement : de 1972 a 1975, le nombre des naissances recule de 230 000.

Jacques Dupâquier


© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, mars 1990

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