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HISTORIQUE DE LAISSEZ-LES-VIVRE – SOS FUTURES MÈRES



IMPRIMERXIIIe Congrès : VIE - FAMILLE - ACTION
L'avortement légal n'est pas et peut pas être
un droit acquis à faire figurer parmi les
droits de l'homme et les libertés

Mesdames, Messieurs, Monsieur le Président, laissez-moi vous dire que vous m'honorez beaucoup en étant auprès de vous ce soir. J'admire tellement votre combat depuis si longtemps – vingt ans, me dit-on – et le fait que vous soyez encore là, et vous aussi, montre que le sujet ne s'éteindra jamais.

Et je me souviens encore du combat au Conseil d'État sur le projet de loi qui devait devenir celui de l'I.V.G., avec le sentiment que vous imaginez chez des gens qui sont là pour défendre l'État et l'interêt général et à qui l'on expliquait que l'État n'avait plus la force de poursuivre les délits
et même les crimes et qu'il fallait – c'est la théorie moderne de l'abandon total de l'autorité – que le droit se rende conforme aux faits et non pas l'inverse, ce qui en effet est plus commode et qui est la négation même du droit. Mais chacun sentait bien, en tout cas, moi tout le premier, qu'on en reparlerait toujours, que jamais une telle loi ne serait acceptée par les consciences. Vingt ans après, grâce à vous et à bien d'autres, ici et ailleurs le combat continue et je voudrais vous apporter ma bien modeste participation sur un sujet que vous avez vous-mêmes choisi, et qui est un sujet tellement évident dans l'histoire des hommes et dans la sociologie humaine.

On a voulu "tolérer", et j'entendais encore tout à l'heure un de mes amis me dire qu'il fallait être tolérant. Et bien ! tolérons. Mais, quand on tolère, on n'est pas loin ensuite de justifier et c'est là le sujet que vous m'avez posé. On ne se contente pas aujourd'hui de dire qu'il ne faut pas punir la femme qui avorte, mais elle veut avoir raison et dire qu'elle a le droit de le faire et que c'est une liberté. Est-ce possible ? Et bien, ce n'est pas possible. Je vais vous dire des choses très simples, c'est du droit : le droit, c'est des idées générales. Mais le droit n'a d'intérêt que s'il est tout à fait conforme au bon sens et que si, donc, chacun y rentre instinctivement. Le droit, ce n'est que la conscience morale appliquée à la société existante.

Et donc, le droit, lui, a éprouvé depuis l'origine qu'une liberté, qu'un droit ne peut être revendiqué que tout d'abord s'il ne nuit pas et si cette liberté ne nuit pas à la liberté des autres. C'est la première chose. C'est même écrit en toutes lettres dans la Déclaration des Droits de l'Homme. Ce serait trop facile : j'ai le droit d'avoir des droits, mais chacun a le même droit. Donc le droit s'arrête au droit des autres, la liberté s'arrête à la liberté des autres. Ce sera mon premier propos de quelques minutes.

La deuxième affirmation que l'on fait dans toutes les philosophies du droit, c'est que le droit que l'on revendique pour soi-même, la liberté que l'on revendique n'est possible, reconnue, acceptée que si elle n'est pas contraire à l'ordre, on dit l'ordre public, nous, c'est l'ordre de la société, c'est l'ordre de tous, là encore, l'ordre et les bonnes mœurs. C'est également écrit dans la Déclaration des Droits de l'Homme et dans l'article 12 du Code civil.

Vous ne souriez pas ? Cela prouve que vous avez encore quelque attache avec une société en ordre. Mais nous savons bien, nous le dirons d'un mot : qu'est-ce qui reste aujourd'hui dans notre société comme ordre et surtout comme mœurs ? On peut même affirmer qu'il n'y a plus de mœurs. Mais il en reste au moins dans les textes, donc dans le droit et personne ne pourra y renoncer, au moins dans son principe. Une société sans mœurs est une société qui se détruit et qui meurt, très vite d'ailleurs, en une génération généralement. On l'a vu autrefois dans beaucoup d'empires.

Et puis enfin la dernière idée, vous voyez il n'y en aura que trois que j'essaierai de vous laisser, la dernière idée est qu'un droit, une liberté ne peut être reconnue, acceptée en droit que si elle est juste. Alors, bien sûr, pour beaucoup la loi, nous le redirons, c'est la force. La loi, elle est là, elle s'impose, il n'y a qu'a lui obéir. On a bien le droit de voter quelque loi que l'on veuille, n'est-ce pas, c'est la loi des tyrans. Mais la loi, telle qu'on l'entend dans la conscience occidentale française, la loi doit être juste comme le reste et un droit ne peut être admis, une liberté reconnue que si elle est juste.

Cela fait donc trois idees que j'essaye de vous développer discrètement et rapidement.

La premiere idée est donc la liberté de choisir, nous dit-on. On lit cela dans le journal Elle que vous m'avez transmis, docteur. La femme est libre de son corps. Oui, à condition de ne pas porter atteinte à la liberte des autres. Or je voudrais d'abord dire très simplement – nous sommes entre nous, on peut parler crûment – la liberté de choisir pour une femme de choisir non pas sa grossesse, après tout elle est toujours libre de la choisir, à part le cas de viol que nous éliminerons, aucune femme n'est obligée de se faire engrosser, que je sache. Donc la liberté de choisir n'est pas celle de la grossesse, c'est celle de la naissance. Alors la liberté de choisir est évidemment liée à la liberte des mœurs, c'est-à-dire à la liberté sexuelle. C'est qu'on veut pouvoir "coucher" et ne pas avoir les conséquences. C'est un des plus beaux vers de la langue française que je ne suis pas sûr d'avoir totalement respecté, mais il reste en alexandrin d'un de nos plus grands postes: « Avoir l'amour sans risque et le plaisir sans peur ».

Évidemment, c'est l'idéal absolu. On voudrait aussi pouvoir avoir les festins dans le cholesterol, et oui ! avoir l'alcool sans la gueule de bois, bien sûr. On veut aussi avoir l'argent sans le travail, on voudrait avoir toutes les médailles sans leur revers : c'est le paradis terrestre ! Seulement voilà, cela ne marche pas très bien. Il y a des limites à tout, c'est cela le droit : il y a des limites à la liberté et notamment à la liberte sexuelle. Alors, moi, je croyais qu'il n'y en avait plus, ou presque. On se demande vraiment aujourd'hui où elles sont... il y en a tout de même, il y en a chez les féministes elles-mêmes, parce qu'enfin nos pères qui se tenaient mieux que nous, mais enfin la nature est là, elle est la même pour tous. Ils avaient des maisons très commodes. On les a fermées parce qu'on a considéré qu'elles étaient tout à fait contraires à la liberté. Ah ! c'était tres mal, les féministes se sont insurgées. La prostitution organisée est interdite. On n'est pas libre tout é fait de trouver ses partenaires, on est même moins libre qu'autrefois. C'est tout de même curieux, ça, et notre société accepte cette limitation.

Je vous ai apporté, parce que c'est une perle, un billet de Mme Sarraute qui est partisan fanatique de l'avortement, comme toutes les... vous savez dans quel milieu elle vit et ce qu'elle est... Elle fait des billets dans Le Monde tres brillants sur les mœurs. Il y en a un que j'ai relu trois fois, j'ai vérifié avant de vous le lire, parce que j'ai vraiment eu peur.

C'est sur les pédophiles, parce que la liberté sexuelle c'est aussi pour ces messieurs, nous dit-elle, – je ne suis pas tres familiarisé avec cela, mais néanmoins on lit beaucoup – la liberté d'avoir des rapports avec de petits enfants ; c'est tout a fait agréable, il y en a qui font le trottoir, vous savez, des petits avenue de l'Opéra ou dans les rues voisines. Et alors dans Gaipied, qui est une revue que je vous recommande, vous m'avez donné Elle, moi je cite Gaipied, il y a une campagne ou l'on revendique non pas le droit de choisir que vous avez observé dans Elle, mais le droit du gamin de disposer de son corps en faveur d'un monsieur, écrit Mme Sarraute, qui brusquement dit: « Qui a peur des pédophiles ? Moi, je refuse, dit-elle, avec la dernière énergie et les avances et les violences dont sont victimes, oui, parfaitement, les moins de 15 ans ». Et elle nous dit : « En Grande-Bretagne, aux États-Unis où les "homo" rejoignent les "hétéro" pour lutter contre la pédérastie - il faut être tres savant dans ce domaine - c'est la fureur. »

Vous savez qu'aux États-Unis il y a une tres belle réaction aussi contre les abominations que nous, nous tolérons. Alors, il paraît qu'il y a une très belle réaction chez les Anglo-Saxons. Profitons-en. On ne parle, paraît-il, que de ça dans la presse et les médias, et ici on n'ose pas. « On aurait l'air de quoi ? dit Mme Sarraute, d'un vieux réac, d'un pote a Le Pen. » Et bien, dit-elle « à ce compte-là, moi, j'en suis! Et n'essayez pas, n'essayez plus d'obtenir mon consentement au droit à consentir que vous avez l'audace d'inscrire parmi les droits du petit de l'homme. C'est intolérable ! » Elle a écrit ça ! je dis ça pour les tolérants : Mme Sarraute dit : c'est intolérable ! Madame Sarraute, vous êtes au bord de l'ordre moral.

Alors, c'est donc que, quoi qu'ils disent et quoi qu'ils fassent, cette quête vers l'anarchie, vers la liberté absolue est une quête sans fin. Et personne, même pas eux, ne pourront jamais l'accepter. À leur tour, ils vomiront. Alors c'est donc bien que la liberté sexuelle et la liberté de choisir pour la femme d'avoir l'amour sans risque a une limite qui est celle, bien sûr, de la liberté des autres. On me disait qu'il y a un père en Belgique qui intenté une action contre une jeune femme à qui il avait fait un enfant et qui s'est fait avorter. Il l'assigné en responsabilité. Il paraît qu'on n'a pas encore le jugement. Ce sera très important. Mais c'est évidemment, et nous le savons bien, hélas ! marginal. Ce qui reste, c'est que l'autre, les autres, interviennent bien évidemment.

J'ai parlé de la liberté sexuelle dans son aspect agréable, mais il y a l'aspect désagréable. Comment dites-vous ? la M.S.T., Oui. Là aussi, on regarde cela de près, comme d'ailleurs beaucoup d'autres abus ou excès, car enfin il y aurait la liberté totale en cette matiere ? Mais, moi, je n'ai pas la liberté de boire 3 verres de cognac avant de prendre le volant ? On m'insulte à longueur de journée, on me dit que je suis un assassin en puissance ! Ma vie privée est terriblement contrainte et là sans limite. Parce que l'automobile, vous comprenez, c'est sacré, c'est l'argent, c'est la circulation. Alors là, les chauffards, l'alcool au volant, on est prêt à nous soumettre à toutes les tortures.

me la drogue. J'ai été tres étonné – il y a quelquefois de bonnes nouvelles dans cette société qui ne reconnaîit aucune valeur morale, où les gens soutiennent qu'on a le droit de tout faire, qu'il n'y a aucune limite, que tout peut se dire... – ah ! la drogue, non. La société a réagi, elle a réagi devant la drogue. C'est vrai que l'État lutte contre la drogue...

Oh ! il lutte à moitié, et c'est tres intéressant pour notre sujet. J'avais dernièrement un colloque à la Faculté de droit sur la lutte contre la drogue et les avocats qui étaient là rappelaient que la loi interdit non pas seulement le trafic de drogue, mais nous interdit de nous droguer, c'est-à-dire
la consommation de drogue, mais que le gouvernement n'applique pas ! Il veut bien poursuivre les trafiquants, mais pas les consommateurs, parce que là, le consommateur aurait le droit de se droguer, mais le petit revendeur n'aurait pas le droit de lui vendre de la drogue pour qu'il se drogue. Comprenez si vous pouvez. Les policiers ont beaucoup de mal à comprendre, et c'est très difficile à comprendre. Mais voyez comme on est déjà là à la limite.

Mais pour ce qui est alors, comme ils disent honteusement, de l'acte sexuel, alors on nous dit : attention ! prenez des préservatifs. J'attends le moment d'ailleurs – on ne sait pas – si l'épidémie se développe, où l'on va nous rendre le préservatif obligatoire, ce sera très intéressant. Mais voyez comme on touche cette idee, qui est la seule que nous ayons à retenir: il n'y a pas de liberté de la vie privée contrairement à ce qu'ils affirment, et qu'eux-mêmes le nient, parce qu'il y a les autres, il y a une liberté qui a comme limite la liberté des autres. Et puis enfin, l'autre, essentiel, celui que nous attendons, que vous attendez, c'est évidemment l'enfant. Quand la femme est enceinte, il y en a déjà un autre ; la seule différence, c'est qu'on ne le voit pas, c'est un dieu caché lui aussi. On peut donc l'insulter, on peut, peut-être même aussi en effet, le tuer, on ne le voit pas, c'est plus facile.

Alors nous, les juristes, nous rappelons toujours la formule que l'on a écrasée il y a vingt ans, à ma stupeur. Les meilleurs juristes l'ont ecrasée : infans oonoeptus pro nato habetur. Cela venait de l'Antiquité, qui était pourtant cruelle : « l'enfant conçu a les mêmes droits que l'enfant né ». On
ne va pas le voler, ce petit, s'il est posthume ; il aura le droit d'hériter comme les autres, il est là, il existe et les juristes avaient dit : il existe, en effet juridiquement, et dès la conception. Que doit faire la loi ? La loi protège le petit dès qu'il est conçu, parce que la loi est faite essentiellement pour protéger les faibles, les autres n'en ont pas besoin. C'est une admirable phrase du Père Lacordaire qui dit : « entre le fort et le faible, c'est la liberté qui asservit et la loi qui libère ». Les socialistes s'en servent un peu ,trop, mais c'est vrai que la loi n'est faite que pour les faibles. Et l'une des choses les plus atterrantes, que les juristes aient dû faire et voir, c'est ce critère que l'on a bâclé, que l'on a inventé : on me dit, il est de dix semaines. Moi, je ne suis pas médecin et je n'ai pas de prétention scientifique, mais personne n'a pu m'expliquer pourquoi c'était dix et pas neuf, ou pas onze, et je suis bien incapable de l'expliquer à mes etudiants. Au contraire, avant, il est encore plus petit, plus caché, il faut donc que la loi le protège encore davantage... Voilà le principe.

D'ailleurs, c'est très émouvant et comme ils sont incohérents ! C'est cette année qu'on a publié la Declaration des droits de l'enfant, c'est formidable ! Cela a un côté complètement ridicule, l'enfant a des droits contre ses parents ; je ne sais pas d'ailleurs qui va le protéger, quand la société le protège contre ses parents, il faut que ce soit dejà des cas affreux. Mais il y a une déclaration des droits de l'enfant, et c'est vrai que l' enfant ne nous appartient pas, et nous le savons bien, nous les parents. Ce n'est pas un jouet, comme certains aujourd'hui voudraient le faire croire. Choisir d'avoir un jouet, comme un chien ! Ce n'est pas un jouet. Dès qu'il est là, c'est un autre et c'est à lui que nous devons l'assistance, l'éducation, l'entretien. C'est pour lui, ce n'est plus nous. Donc, il est normal après tout qu'on ait fait une déclaration des droits de l'enfant. Mais alors, l'enfant... ils n'ont pas dit dans la déclaration quand il commence, à partir de quel moment a-t-il des droits ? Dix semaines ? Neuf mois ? Un jour, vous me dites quand ? C'est terrifiant de penser à cela. Nous, les juristes, nous sommes obligés de faire des seuils : les droits changent à partir d'un certain âge, la majorité, la naissance, le mariage. Nous prenons des actes de la vie auxquels on accroche un système juridique : la conception, oui, la naissance, oui. Mais dix semaines, qu'est-ce que vous voulez qu'on accroche à dix semaines ?

Dans cette déclaration des droits de l'enfant, faudrait-il dire – les mots ont de l'importance – que l'enfant au départ n'est pas un citoyen, qu'il n'a pas de droits, que c'est l'esclave sur lequel sa mère a droit de vie et de mort comme autrefois ? Mais vous avez supprimé l'esclavage, pourtant. La déclaration des droits de l'homme, c'est bien cela : personne n'a droit de vie et de mort, sur l'enfant, si, avant dix semaines. C'est cohérent ! C'est beau... raisonnez-moi tout cela, vous n'y arriverez pas.

Et j'arrive à ma deuxieme idée : et bien, oui, toute liberté a comme limite – beaucoup l'oublient aujourd'hui – l'ordre public et les bonnes mœurs. C'est écrit dans la Déclaration des droits et c'est l'article 12 du Code Civil. On dit : il en reste peu de chose, ça, c'est sûr, mais il reste qu'en droit, dans les textes, aucune société ne peut renoncer, sous peine d'exploser tout de suite et d'entrer dans l'anarchie, à cette idée que la conduite de chacun engage les autres et tous les autres, et engage la société.

Un exemple sur les mœurs : l'outrage public à la pudeur. Le Code pénal retient toujours l'outrage public à la pudeur. J'attends la proposition de loi, même de ces féministes ou même des patrons ignobles qui font les publicités porno, qui abroge l'article du Code pénal sur l'outrage public à la pudeur. Le délit est commis tous les dixièmes de seconde à la television, sur les affiches, sur les plages. L'outrage public à la pudeur fait partie de ce que nous voyons à tout instant, mais on ne l'a pas rayé des codes. C'est curieux ! Il faudrait mettre le droit en rapport avec les faits, aller jusqu'au bout. Supprimez-le, on se promènera tout nu, ce sera très intéressant et vous verrez combien de temps cela va durer la paix publique dans la rue avec les gens tout nus ! Vous verrez... Vous ne le faites pas ? Comme c'est étrange !

On se plaint aussi de la police, de la brutalité policière, de la violence d'État. Licenciez la police, soyez logiques. Cela nous fera des économies, on en a tellement besoin ! Pourquoi les gardez-vous ? C'est curieux. On les garde parce que personne ne peut y renoncer sous peine de faire sauter la société elle-même. Vous savez que la société saute, vous savez pourquoi juridiquement ? Je parle de la société juridique. Parce que l'absence des mœurs, l'outrage public à la pudeur, c'est ce que ~ous voyons le plus. Ce qu'il y a de plus grave probablement de tout, c'est le concubinage après le divorce par consentement mutuel. M. Giscard d'Estaing – je le dis partout bien que j'ai appartenu à son parti – a détruit la société française en faisant le divorce par consentement mutuel, et qui a entraîtné automatiquement le concubinage généralisé. Pourquoi voulez-vous que les jeunes se marient, c'est-à-dire signent un contrat qui ne comporte aucun droit et aucune obligation, puisque le lendemain on peut le dechirer. Vous ne signez pas un contrat comme ça ! Quand vous vous dérangez pour signer un contrat, pour acheter ou pour vendre, cela vous donne un droit. Le mariage est le seul contrat en droit français qui ne vous donne aucun droit et qui ne vous soumet à aucune obligation. Vous pouvez le déchirer le lendemain et répudier comme dans l'Antiquité. Résultat : les jeunes se disent « ce n'est pas la peine de se marier évidemment puisqu'on peut divorcer » ce qui est le bon sens même. Et ils vivent ensemble, dans un état de non droit et qui – je vous le dis en homme de métier – fait qu'il n'y a plus d'état civil aujourd'hui, état civil qui est à la base de toutes les transactions, de toute la construction juridique. Aucun secrétaire de mairie ne peut plus vous donner la sécurité de l'état civil. Les notaires me disent : on ne peut plus passer aucun acte notarié ;si nous appliquions les règles de déontologie, ils sont tous faux parce que tous les états civils aujourd'hui – mettons 9 sur 10, pas vous, mais ceux de la masse – sont faux. Les gens n'ont plus de nom. La femme n'a plus de nom : elle ne se marie pas, elle garde son nom, elle se marie, elle le garde aussi, ou elle l'ajoute à celui du mari, et si elle divorce elle en a un troisième.

Je rappelle toujours que le Roi de France, François 1er, par l'ordonnance de Villers-Cotterêts, au XVIème siecle, a donné cent ans d'expansion économique à la France et a fait de la France le premier pays de l'Europe à terme par deux phrases qui étaient deux phrases admirables – quelle belle langue !
« La femme portera le nom de son mari, les enfants porteront le nom de leur père ». Ces deux phrases ont été rayées depuis dix ans. Il n'y a plus de nom. Quand l'homme et la femme se rapprochent, Mesdames et Messieurs, s'ils ne vont pas le dire au moins à M. le maire – je ne dis plus à M. le curé, M. le curé s'en fout – mais au moins à M. le maire, si on ne le sait pas qu'ils vivent ensemble, sur le même compte, qu'ils vont peut-être... peut-être procréer, qu'ils vont emprunter ensemble, qu'ils vont peut-être avoir un accident ensemble, qu'ils vont acheter quelque chose ensemble, s'ils ne le disent pas, nous sommes impuissants à vous maintenir quelque ordre administratif et juridique que ce soit. Tenez, je vous dis en passant – il n'y a que moi qui vous le dirai – il y a eu une grêve des impôts qui a duré sept mois l'année dernière, qui a détruit le système fiscal français pour 5 ans, m'a dit le directeur général. Personne ne vous a dit pourquoi. Bien sûr, il y a toujours les bêtises habituelles, des revendications, mais la vraie raison, Mesdames et Messieurs, c'est que l'administration française ne peut plus établir la taxe d'habitation, ni l'impôt sur le revenu.

Moi, je préside deux sociétes d'H.L.M., j'ai 15 000 locataires. Je ne sais pas qui j'ai comme locataires. Il faut maintenant que je demande des cautions bancaires, parce que je n'ai que des concubins pour venir s'installer et que moi, ma garantie, c'est un homme et une femme mariés, chez eux : quand l'un est chômeur ou tombe malade, l'autre me paye, c'est cela ma garantie. Là, ils ne sont en rien engagés l'un envers l'autre et mes services me disent qu'au bout d'un an la femme a changé d'etage... alors que voulez-vous que je devienne ? Je n'ai plus rien. Il faut demander, vous dis-je, des cautions bancaires et faire des actes épais comme cela !

Et personne aujourd'hui ne peut établir la taxe d'habitation. Vous savez qu'elle dépend des personnes vivant au foyer. Vous avez dit "foyer", Monsieur ? Il n'y a pas de foyer. Alors vous connaissez les Français. On lui dit : « ah ! bien, cette fois vous étiez avec Mme, ou Mlle... » on ne peut plus parler d'une femme aujourd'hui, même au Conseil d'État, c'est impossible. Personne ne sait si elles sont Mlle ou Mme. De temps en temps elles ont un enfant, ce qui est surprenant. Elles ne sont évidemment pas mariées. Qu'est-ce que vous voulez faire ? Alors, la taxe d'habitation ? Les enfants, on ne sait pas à qui ils sont, on ne sait pas comment ils ont été déclarés, et je ne vous parle pas, bien entendu, des étrangers...

Je préside la Commission Supérieure des réfugiés. Tous les apres-midi, j'écluse des dizaines d'étrangers clandestins. Il en arrive 6 000 par mois, sans compter ceux qui rentrent avec des visas de complaisance, et naturellement on ne sait pas où ils sont, on ne pourra jamais reproduire leurs noms. Il y a 30 000 Tamouls à Paris. Je vous assure que leurs noms comportent chacun 8 syllabes, que la femme n'a pas le même nom que le mari et que les enfants n'ont pas le même nom que leur père. Nous avons au Conseil d'État des procès tous les jours de gens qui piquent des mandats dans des boîtes aux lettres du voisin et qui vont les toucher au guichet de la poste. Ils ont volé le mandat. La postière ne peut pas s'en apercevoir. Dans le dernier procès que j'ai vu, la postière était grecque, elle avait devant elle un Marocain qui avait pris le mandat d'un Hindou.

Donc notre conduite, notre nom, notre foyer, tout cela engage la société et vous n'aurez plus de société. Je vous prédis qu'avant une generation vous ne pourrez plus acheter une maison ou un terrain, parce que vous ne saurez plus à qui il sera. Et comme au Moyen-Âge – nous avons appris cela dans nos études – pour savoir à qui appartiendra un enfant ou un terrain, on fera une enquête par turbe : on réunira les vieux du village et alors, en se creusant la tête, ils diront : « ah ! oui, cela devait être le jour où la grande rousse était avec le petit brun là-bas, au coin de la rue ».

L'ordre public, c'est aussi le devoir civique. Il n'y a pas d'ordre si le citoyen ne fait pas son devoir. La femme qui n'accouche pas manque à son devoir civique. La femme est faite pour procréer, ce n'est pas nous qui pouvons le faire. Je dis ça souvent à mes collèges femmes, qui sont des femmes remarquables : vous pouvez faire tout comme nous. Vous avez deux bras, deux
jambes, et une cervelle, donc toutes les femmes peuvent faire la même chose que les hommes. Seulement voilà, la réciproque n'est pas vraie. Alors, si vous, vous ne faites pas les enfants, ce n'est pas nous qui pourrons les faire ! Disons que la société s'arrêtera. Ce qui fait que les femmes qui ne veulent pas avoir des naissances laissent les autres le faire. Cela a un nom: cela s'appelle de la désertion. On peut avoir de la compréhenston, de l'indulgence pour les cas particuliers, le problème n'est pas là. Mais on ne peut supprimer la faute.

L'exigence des bonnes mœurs bien sûr est liée aussi tres explicitement à cette campagne pour le droit de choisir, car nous savons bien que tout cela vient de la volonté de garder des rapports sexuels deésordonnés... bien que, la première fois qu'on m'a parlé d'avortement, c'était mon médecin de quartier, un homme admirable, qui m'a dit : « vous savez, cet après-midi, un officier de marine est venu avec sa femme et sa femme m'a dit : docteur, je voudrais avorter. Je leur ai dit : il vous est arrive une catastrophe, vous ne pourrez pas l'elever ? vous êtes mariés !  Oui, on est marié, on a dejà 3 enfants, mais on trouve que c'est assez. On a d'ailleurs prévenu les autres, on en a tenu conférence ce matin à table.» Alors, évidemment, on voit de tout. Néanmoins, incontestablement, sur ce point on peut être sûr que tout cela vient de ce que l'on ne veut pas avoir bien sûr une discipline de ses mœurs.

Je finis sur la dernière idée : une liberté, un droit ne peuvent être reconnus que s'ils sont conformes à la justice. Et là, je le dis, autrefois c'etait une naïvete. Maintenant je suis obligé de le redire partout, à tous les fonctionnaires publics, et pas seulement à mes étudiants. Pourquoi ?
Et bien, tres curieusement nous avons été envahis de philosophie allemande. Il y a deux philosophies du droit dans le monde, Mesdames et Messieurs, vous le savez : celle que l'on appelle du droit positif et celle que l'on appelle du droit naturel.

C'est élémentaire. Les Allemands ont toujours été pour le droit positif, c'est-à-dire que leur principe c'est que c'est la force qui fait le droit. Ce n'est pas nul, mais c'est grossier. La loi, le droit, c'est ce qui et ce qui pèse sur nous et ce qui est sanctionné, ce que nous sommes obligés de faire. Mais jamais pour des gens comme nous, qui venons des Grecs, des Latins, des chrétiens, jamais nous n'accepterons cette conception, et Antigone est la première : la révolte d'Antigone marque bien ce qui est le fond de la dignité et de la liberté humaine. Nous n'acceptons la loi, même si nous sommes obligés de nous y soumettre, nous ne l'acceptons en conscience et nous ne l'accepterons à la longue que si elle est juste. Et à ce propos suis obligé de dire qu'un homme a dit récemment une phrase belle et juste qu'on lui a reprochée, bêtement, peut-être aussi parce qu'elle n'était pas appliquée quand il le fallait, ça, ce n'est pas mon propos d'aujourd'hui mais il a parlé de « la force injuste de la loi. » Oui, c'est aussi une phrase, d'ailleurs du Père Lacordaire, et c'est la phrase de tous les chrétiens, c'est la phrase de tous les civilisés. La loi du tyran, ça n'est pas le droit, nous le savons bien, et la loi d'une majorité de circonstance dictée par l'interêt ou la passion, ça n'est pas non plus le droit.

Alors, bien entendu, tous les existentialistes, tous les sartriens, les matérialistes diront : mais alors qui dira si elle est juste ? Oui, toute la question est là. Mais qui renoncera aussi comme hornme à rechercher ce qui est juste et ce qui ne l'est pas. Et moi je dis à mes élèves – ils le savent bien, bien qu'ils soient tous adeptes de Freud, de Marx, et de Sartre sans le savoir, on ne leur a appris que cela ! Que tout homme quel qu'il soit, quelle que soit son époque, quel que soit son pays sur la surface de la terre, quel que soit son niveau de développement, devant un cas concret, sait très bien dans sa conscience – c'est le postulat même de l'humanité, le postulat de l'intelligence et de la conscience morale – il sait très bien ce qui est juste et ce qui ne l'est pas. Il le sait très bien. Cela ne vient pas de lui, ce n'est pas individuel, ce n'est pas subjectif. Non. Il le trouvera pour tout le monde, il le trouvera pour l'universalité, c'est la logique et c'est la morale. Il n'y a que ces honteux existentialistes, chrétiens ou pas qui, les premiers depuis 20 000 ans, détruisent l'intelligence et détruisent le sens moral en disant qu'il n'y a de verité que clle qui nous monte du bas-ventre ou celle que nous trouvons tout seul, et que nous ne pouvons convaincre personne, et qu'il faut tout tolérer parce qu'on est incapable de convaincre, parce qu'il n'y a pas de verité en dehors de celle que l'on a et en dehors de la sincerité. C'est la première fois, Mesdames et Messieurs, en 20 000 ans que l'on détruit l'intelligence, que l'on nous interdit de juger, de comprendre, de discerner et de savoir, en effet, ou est le bien et ou est le mal. Cela, vous le savez.

Nous savons bien, en ce qui concerne précisement le sujet de ce soir,que depuis le premier jour l'homme et la femme qui se rapprochent savent qu'ils s'engagent tout entiers l'un vis-a-vis de l'autre et qu'ils engagent aussi l'autre, celui qui va en naître, qu'aucune société, quelle qu'elle soit, ne peut empêcher qu'amour rime avec toujours, qu'aucun juriste, si desincarné qu'il soit, ne peut accepter sans en voir les horribles conséquences qu'un couple se sépare avant d'avoir élevé les enfants... et rembourse les emprunts, que ce n'est pas possible autrement. Et le calvaire des petits, et le calvaire d'un homme et d'une femme qui s'insultent, qui se haïissent après s'être aimés est un spectacle épouvantable. Je croyais que la sensibilité moderne ne le supportait pas. C'est la nature qui commande le droit des personnes, vous le savez, on appelle cela le droit naturel. Un droit qui renie la nature n'est qu'une offense et qu'une tyrannie et chacun sait d'ailleurs les scientifiques surtout – qu'on ne commande à la nature qu'en lui obéissant.

Je vais ajouter un argument pour les libertins – ce n'est pas ceux qui sont là, mais ceux que vous rencontrez tous les jours. J'ai connu un homme, il était medecin – les médecins ont des facilités – qui avait fait dans la vie pour trouver son plaisir tout ce qu'il est humainement possible de faire et de chercher. Il m'a dit : « Tu sais, j'ai tout fait, tout essayé. Et bien, je vais te dire : le seul plaisir complet et vrai, c'est quand on fait l'amour à la femme que l'on aime pour lui faire un enfant ». Alors, je vous donne cet aveu d'un libertin, puisqu'il n'y a plus que cela autour de nous.

Alors, bien sûr, depuis le premier jour, l'homme essaye d'échapper à sa nature, à la souffrance, à la mort. Il essaye au moins de les oublier. Mais vous savez qu'elles se vengent toujours. Certes, chaque fois que nous attendons un enfant – et la femme doit être comme le père – nous sommes saisis d'une angoisse que l'on a devant toute chance nouvelle, devant toute responsabilité, devant tout bouleversement. Mais nous savons bien que c'est compensé par cette sorte d'aventure étonnante qui est la seule chose qui donne le sel de la vie, et celle qui cède à l'egoïsme ne sait pas ce qu'elle se prépare pour plus tard. Vous êtes comme moi : au soir de la vie, vous avez vu beaucoup de gens qui regrettent de ne pas avoir eu beaucoup d'enfants. Je n'en ai jamais vu qui regrettaient d'en avoir trop. Alors celles qui les tuent ou ceux qui aident à les tuer n'arrêteront pas de nous scandaliser et ne pourront en tout cas jamais se faire passer pour des justes.

Alain de Lacoste-Lareymondie

© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, 3 mars 1991

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