Laissez-les
Vivre : qui ? Nous sommes certes contre la cruauté
envers les animaux qui souvent va de pair avec celle envers les
humains. Mais nous n'admettons pas qu'on préfère
les bébés-phoques en tuant les bébés
humains, qu'on milite contre la vivisection animale en acceptant
d'expérimenter sur les ftus humains.
Avec
les écologistes nous luttons contre les pollutions de la
société de consommation mais nous ne négligeons
pas la pollution humaine du libéralisme amoral si bien
dénoncée par Jean-Paul II au Parc des Princes
avec l'heureuse approbation des jeunes.
II
faut respecter la nature, milieu de vie nécessaire à
l'homme comme à l'animal, donc en référence
à l'homme car c'est la nature humaine qu'il faut respecter.
Mais
cette référence à la nature, à la
morale naturelle demande à être expliquée.
II ne s'agit pas du tout de refuser la civilisation basée
sur science et technique pour retrouver le naturel sauvage. Celui-ci
ne permettait pas par ignorance de bien épanouir la nature
humaine. Se référer au naturel ne refuse pas l'essentiel
humain qui est le culturel, mais celui-ci est la caractéristique
de la nature sociale, communautaire et politique de l'homme. Respecter
la nature humaine c'est donc porter un jugement de valeur sur
toute nouveauté culturelle trop étourdiment baptisée
"progrès" et ne l'accepter comme progrès
qu'en référence à une meilleure possibilité
dé réalisation des aptitudes naturelles de l'homme.
N'est-il pas dommage que le progrès technique nous conduise
à une société plus dénaturante que
la société primitive ?
Il
est naturel de ne pas avorter car dès la conception l'homme
a droit à la vie, un droit que ne permettait pas la société
primitive avec ses avortements de misère et une culture
qui n'acceptait pas toute naissance.
Quand
on préconise des méthodes naturelles de régulation
des naissances, ce n'est pas préconiser le passé
: c'est bien la science qui nous fait connaître les signes
d'ovulation, donc la nature féminine. Ce qu'on refuse comme
artificielles ce sont les méthodes qui
déshumanisent l'amour en dénaturant l'acte sexuel
ou l'endocrinologie féminine.
Mais
ce serait une autre erreur que de qualifier de naturelle une sexualité
instinctive irresponsable d'esclavage du désir qui conduit
à une fécondité excessive involontaire, dite
à tort naturelle, cette sexualité la plus courante
et qu'on propose aux jeunes et qui conduit à la contraception,
l'avortement et la stérilisation, une sexualité
sauvage sous-animale qui est humainement dénaturée
empêchant la lucidité d'une rencontre personnelle
et d'une procréation vraiment volontaire.
Le
naturel humain n'est en rien ce qui nous semble "naturel",
la spontanéité inéduquée : le propre
de la nature humaine c'est de savoir contrôler ses pulsions
en fonction d'un jugement lucide sur ce qui est bon, donc naturel,
ou mauvais donc dénaturant. Nous sommes hélas bien
loin d'une vraie sexualité naturelle humaine à base
de contrôle cérébral des réflexes et
de la sensualité au service de l'amour.
Le
respect de la nature c'est ainsi la recherche d'un idéal
à réaliser de mieux en mieux, qu'il s'agisse des
possibilités naturelles de notre organisme encore ignorées
ou qu'il s'agisse d'un milieu naturel que l'homme doit utiliser,
mais en le respectant, développant ses possibilités.
Le naturel humain ce n'est pas la pathologie de l'indifférence
et de l'agressivité, c'est la découverte de l'amour
au coeur de notre être et l'apprentissage dé ses
lois.
P.
Chauchard
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, octobre 1980
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