On
aimerait se réjouir de l'inquiétude des médecins
devant les nouvelles possibilités de la biologie et leurs
menaces vis-a-vis des droits de l'homme notamment devant les risques
d'eugénisme raciste comportant l'éli-mination de
ceux qu'on proclame anormaux donc indignes de vivre.
La
conscience des spécialistes va pouvoir se décharger
en s'en remettant aux comités d'éthique. Un groupe
de personnalités recon-nues pour leur compétence
scientifique, médicale, philosophique, morale, religieuse
sont chargées de préciser ce qu'il faut autori-ser
comme bon et ce qu'il faut interdire comme mal.
Or les premiers résultats, malgré certains aspects
positifs ne peuvent nous satisfaire pleinement. Comment ne pas
ressentir une gène éthique devant cette " éthique
si étique" qui veut remplacer scientifiquement ce
que chacun appelle morale.
Il
semble en effet que la base des réflexions soit une profonde
incertitude face à la valeur des nouveautés, une
crainte d'arrêter le progrès, une difficulté
à distinguer le vrai progrès d'un changement dangereux.
Il s'agit surtout de ne pas choquer l'opinion, d'aller doucement
en laissant à la propagande le temps de convaincre la majorité.
Nombreux
sont ceux aujourd'hui à penser même parmi les scientifiques,
les philosophes, que la vérité n'existe pas ou tout
au moins qu'elle échappe à nos possibilités
humaines limitées. Chacun a sa vérité qui
dépend de ses croyances personnelles, certes respectables,
mais qu'on ne peut imposer à tous. La base des discussions
est donc un dialogue tolérant dans la recherche d'un consensus
qui ne peut être qu'un minimum acceptable pour tous.
C'est
cela que nous ne pouvons admettre. Non que, par intolérance
fanatique, nous voulions imposer nos opinions fondées sur
une idéologie. Mais parce que nous croyons à une
morale naturelle commune de respect de la vie humaine qui ne dépend
pas d'abord d'une idéologie religieuse, même si celle-ci
la rend plus valable et plus accessible, mais qui peut avoir un
fondement scientifique incontestable.
Pourquoi
alors, dira-t-on n'est-elle pas acceptée par la plupart
des scientifiques ? C'est qu'ils ont peur de sortir de leur
domaine de vérité. Ils sont convaincus de ce faux
dogme que la science n'a rien à voir avec la morale, qu'elle
ne rencontre pas les valeurs, que ce qu'elle indique n'est pas
impératif. Etonnante erreur car la science biologique nous
révèle les lois de bon fonctionnement, d'équilibre
et d'épanouissement de notre organisme : la morale s'impose
a nous, à moins de folie, comme une hygiène individuelle
et sociale, de l'ordre du sain opposé au pathologique.
Cantonnés dans l'analyse de petits faits on ne les replace
pas dans l'ensemble. On se réjouit de prouesses comme la
fécondation in vitro, la greffe utérine et
on ne voit pas les échecs, les embryons avortés,
les dangers pour la psychologie de l'enfant ou de la mère.
Il n'y aura qu'à rassurer comme si on pouvait rassurer
des troubles inconscients provenant de l'atteinte aux lois de
la vie.
Il
y a plus grave : pour des raisons difficiles à préciser,
bien des scientifiques contestent la science, continuent par exemple
à ne pas savoir quand l'embryon devient humain ce
qui est une ignorance de la génétique ou
à nier l'importance des relations biologiques et psychologiques
intra-utérines entre la mère et l'enfant. Tant qu'il
n'est pas absolument prouvé qu'une pratique est mauvaise,
on la dit bonne. Pour le bien de certains malades, on utilise
des embryons avortés comme du maté-riel, retardant
ainsi la découverte de meilleures thérapeutiques.
Oui
au contrôle moral mais en référence à
un absolu et non à un relativisme évolutif.
Dr
Paul Chauchard
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, mai 1985
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