Dans
sa conférence de presse récente, le Président
de la République a déclaré à propos
de l'avortement des choses surprenantes :
1)
qu'il espérait, par le projet de loi gouvernemental, voir
diminuer le nombre des avortements provoqués ;
2) que ce projet était modéré et séparait
nettement ce qui est permis de ce qui ne l'est pas.
Nous
examinerons d'abord ce second point.
On
remarquera,
1°
que l'avortement selon ce projet doit être remboursé
'par la Sécurité sociale, ce qui est un encouragement
évident et non un signe de modération ;
2°
que par ce projet l'avortement est permis jusqu'au 9ème
mois inclus soit jusqu'à la veille de l'accouchement, l'enfant
pouvant être ainsi tué jusqu'aux dernières
heures précédant sa naissance, ce n'est pas non
plus un signe de modération et à notre connaissance
il y a très peu de lois, et peut-être aucune, y compris
dans les pays les plus avorteurs qui autorisé ce meurtre
jusqu'à l'accouchement.
3°
que grâce au concept de risque on peut tuer un enfant sain
de mère saine simplement sur une présomption de
risque sans preuve, l'existence d'une anomalie de l'enfant qui
paraît d'après le projet être une indication
à son meurtre, revient à demander au médecin
de tuer le malade ce qui est une conception nazie de la médecine.
Ce n'est pas encore une conception modérée.
4°
que grâce au concept de maladie éloignée on
peut tuer en 1973 un enfant pour une maladie hypothétique
de la mère qui surviendra ou ne surviendra pas en l'an
2000.
5° que grâce au concept de santé psychique on
peut tuer un enfant pour une simple contrariété,
la contrariété étant une perturbation psychique.
Cette caractéristique du projet inclut intégralement
la convenance personnelle.
C'est
donc un projet extrémiste, correspondant complètement
à l'avortement libre et gratuit du M.L.F. puisque 'l'avortement
est possible toujours et qu'il est remboursé ; la
seule différence avec le projet du M.L.F. est que le Gouvernement
compte rembourser les consultations de deux avorteurs alors que
le M.L.F. ne demandait que le remboursement d'un seul avorteur,
ce qui double le nombre des consultations remboursées aux
avorteurs.
Ce
n'est donc que par une véritable tromperie de la part de
certaines personnes que le Président a pu déclarer
ce qu'il a déclaré.
Le
Président a déclaré qu'il espérait
que par ce projet le nombre des avortements provoqués diminuerait.
Cette déclaration est hautement anormale.
II
est établi dans tous les pays où la libéralisation
a eu lieu que les avortements clandestins persistent et que dans
tous ces pays le nombre des avortements provoqués a par
la libéralisation été augmenté massivement
alors même que la loi de libéralisation imposait
des restrictions que n'impose pas le projet gouvernemental.
Voici
les chiffres
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Avant
la libéralisation
|
Avec
la libéralisation
|
Roumanie
Bulgarie
Hongrie
Tchécoslovaquie
Angleterre
Suède
État de New-York
(U.S. News and World Report du 5 février 1973)
|
129 000 (1958)
17 400 (1953)
36 000 (1950)
30 600 (1953)
54 819 (1969)
3 528 (1963)
50 000 (1969)
|
1 115 000 (1965)
119 000 (1966)
220 000 (1966)
115 800 (1966)
156 714 (1972)
16 038 (1970)
700 000 (1972)
|
On
constate ainsi partout une augmentation énorme du nombre des avortements
provoqués par la libéralisation. Ce fait apparaît comme absolument
constant.
Et
on ne voit pas comment le Président de la République a -pu dire
qu'il espérait par ce moyen voir diminuer le nombre des avortements.
On voudrait bien savoir au nom de quel argument et de quelle hypothèse
un tel avis a pu sortir de la bouche de la plus haute autorité
de l'État.
On
voudrait bien savoir au nom de quel mystère la France ferait ainsi
exception à la loi générale.
On
peut se demander si un certain nombre de personnes ne se trouvent
pas près des autorités supérieures pour les tromper, ce qui serait
une explication possible.
La
Presse favorable aux avorteurs essaie de démontrer que la légalisation
de l'avortement n'a aucune action sur la natalité. Là encore c'est
une contre-vérité et depuis la légalisation le taux de natalité
en Angleterre est passé de 16,9 pour 1000 en 1968 à 14,7 en 1972,
c'est-à-dire moins 2,2 pour 1000 ce qui est une baisse importante
(13 %).
Le
fait que les taux belge 14 pour 1000 et allemand de l'Ouest 11,3
pour 1000 soient plus bas bien que la loi sur l'interdiction de
l'avortement ne soit pas abrogée ne change rien à cette conclusion
pour la raison très simple que ces lois, certes ne sont pas abrogées,
,mais ne sont pas appliquées, ce qui équivaut sur le plan pratique
à la quasi-libéralisation.
Bien
que discuté, le cas roumain est très démonstratif. II est vrai
que la natalité roumaine commençait à baisser quand la loi de
libéralisation est survenue en 1958 : 413 000 en 1952,
402 000 en 1953, 422 000 en 1954, 443 000 en 1955, 426 000 en 1956, 408 000 en
1957, 391 000 en 1958 (date de la loi de libéralisation),
274 000 en 1966. L'état d'esprit malthusien, la contraception
et l'avortement qui en sont les moyens, ont un rôle dans cette
baisse et pas l'avortement seul. Mais on est obligé de noter à
partir de la libéralisation l'accélération considérable de la
baisse, Mis à part le clocher occasionnel en 1955, la baisse qui
avait été de 31 000 en 4 ans (19541958) a été pendant la
libéralisation de 114 000 en huit ans, soit prés de deux
fois plus rapide.
Le
rôle de la libéralisation est prouvé par l'évolution de la natalité
roumaine avec la suppression de cette libéralisation (octobre
1966) qui est le seul facteur à avoir changé à cette date : 274 000
en 1966, 528 000 en 1967 et la nouvelle baisse de natalité
survenue en Roumanie depuis 1967 ne change rien à cette conclusion.
II
est évident que l'état d'esprit malthusien persistant en Roumanie,
les Roumains qui se servaient de l'avortement comme méthode normale
de restriction des naissances vont se servir maintenant de l'autre
moyen dont dispose le malthusianisme, à savoir la contraception.
La baisse s'arrêtera quand l'état d'esprit fondamental changera.
Mais
l'interdiction de l'avortement ralentit cette baisse y opposant
un obstacle, un certain nombre de naissance se produisant qui
n'auraient pas été si l'avortement avait été libre.
II
faut donc s'attendre en France, par la libéralisation totale et
encouragée, à une très forte baisse de la natalité qui va mettre
en péril l'avenir national et accroître verticalement le vieillissement
de la population française.
Aucun
débat n'a eu lieu pour décider de ce renversement de la politique
française sur un phénomène décisif et il est anormal que le Président
de la République ait omis de parler de ce point essentiel.
© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, décembre 1973
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