Une
de nos adhérentes nous adresse la lettre suivante :
Messieurs,
C'est
toujours avec plaisir que je lis les articles d'intérêt
général du Courrier de Laissez-les Vivre.
Un
médecin pourrait-il exposer les précautions à
prendre, certes, mais surtout les espoirs quand une femme de plus
de quarante ans va être mère. En effet, certains
gynécologues sont décourageants ; et après
ce que les spécialistes expliquent Il est difficile à
des profanes d'opposer des arguments.
Avec
mes vifs remerciements et ma gratitude pour tout ce que vous faites
aussi courageusement.
Chère
Madame,
Votre
lettre est bienvenue, car elle suscite un message à plusieurs
mamans que j'ai connues et à d'autres que je devine.
Vous me pardonnerez d'être bavard, mais la maman d'un certain
âge a souvent l'impression d'être un cas singulier
: elle arrive à la maternité en dehors du peloton
des 20 à 30 ans. Et pourtant, si son cas n'est pas banal,
il peut être exemplaire et l'on ne compte pas les films
d'accouchements sans douleur dont la vedette porte des rides.
Car
les rides témoignent d'une personnalité remplie.
Moins disponible, mais plus affirmée. Les mamans de cet
âge n'ont d'ailleurs pas toutes le même passé.
II y a par exemple celle qui a été longtemps stérile
et qui reçoit l'enfant du miracle. .Il y a celle qui s'est
mariée tard. II y a le maman de grands enfants qui entre
dans une nouvelle jeunesse, souvent aidée par les attentions
prévenantes de ses aînés. II y a surtout les
mères de famille nombreuse (une maternité, même
non planifiée, n'est pas forcément redoutée).
II y a même des femmes seules qui, percevant leur solitude,
bravent le qu'en dira-t-on. II y a parfois l'infirme. II y a la
femme qui a été malade. II y a aussi celle qui se
remarie, celle qui vient de perdre un grand enfant.
Chacune
aborde donc la maternité avec un passé différent.
C'est une expérience singulière, imprévue.
La grossesse, la naissance, l'enfant, seront pour la maman
et aussi pour le médecin un voyage en terre inconnue,
et c'est peut-être pourquoi l'un et l'autre ont peur.
Et
pourtant, sur le plan médical, neuf fois sur dix tout ira
pour le mieux. On n'est certes plus à l'âge le plus
favorable car cet âge sa situe de bonne heure, de 20 à
25 ans, à l'âge de la vigueur, l'âge des champions.
Mais
quels sont, au juste, les risques ?
II
est certain, d'abord, qu'avec l'âge certaines femmes sont
entrées, sans toujours le savoir, dans la maladie. Beaucoup
ont encore des artères de vingt ans, mais pas toutes. Plusieurs
ont pris de l'embonpoint. Quelques unes s'acheminent vers le diabète
de la cinquantaine. Toutes approchent de ce tournant de la cinquantaine
qui réserve à certaines personnes de mauvaises surprises.
II
est donc important de ne pas négliger la surveillance prénatale ;
je le dis, en particulier, aux mamans qui ont beaucoup d'enfants.
Elles comptent bien que tout aille pour le mieux, comme par le
passé. Mais leur utérus est spacieux et l'enfant
peut fort bien s'y placer de façon atypique, même
dans les derniers jours avant la naissance.
Dans
un autre ordre d'idées, chère Madame, on vous a
dit, et répété, le risque d'avoir un enfant
mongolien (trisomie 21) et vous attendez mes explications sur
ce point. Je pense qu'il s'agit d'une préoccupation nouvelle,
entretenue par les mass media, et que ce risque connu depuis
plus de cinquante ans, n'était guère mentionné,
il y a dix ans encore, dans les livres de médecine. C'est
un peu la propagande des avorteurs qui s'attaque aux mamans âgées.
On voit pourtant des trisomies chez les enfants de mères
toutes jeunes, et pas de façon exceptionnelle. Gardez donc,
s'il vous plaît, votre calme devant les médecins
pessimistes.
Quand
l'enfant mettra, enfin, l'accouchement peut requérir plus
d'interventions à votre âge. Mais une césarienne
n'est pas une catastrophe ; une application de forceps faite
comme il faut, n'a jamais fait le moindre mal à un enfant.
Un conseil enfin, préparezvous à l'accouchement
dit sans douleurs, à moins bien entendu qu'ayant enfanté
il y a très peu d'années vous n'ayez aucun besoin
d'être recyclée.
Ces
dernières années, j'ai été très
soutenu quand je suivais des patientes âgées, par
la lecture d'une statistique où 23 femmes, de plus
de 45 ans, avaient eu 23 enfants vivants, dont aucun n'était
trisomique, et dont deux, seulement, pesaient moins de 2 500 g.
Je
suis donc très rassuré pour dire, aux mamans qui
art des rides, que leur enfant vivra, qu'il les rajeunira, et
les fera entrer dans un monde merveilleux.
P.
Vignes
© Laissez-les-Vivre
SOS Futures Mères, juillet 1976
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