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DÉBAT PHILOSOPHIQUE, RELIGIEUX ET MORAL SUR
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IMPRIMERL'avortement et les erreurs de raisonnement

On insiste sur les conséquences de l'avortement, sur la démographie, l'économie, la psychologie, mais on omet son incidence sur les méthodes de raisonnement dans la pensée contemporaine. II est temps de montrer que la crise de la conscience actuelle se caractérise par la convergence de tous ces secteurs : ordre public, institutions, famille, morale, éducation, logique, foi ... Convergence qui fait la gravité de notre désarroi et qui culmine dans la confusion des analyses, des raisonnements, des jugements. Éclairons cette zone de la mentalité contemporaine laissée dans l'ombre par insouciance ou calcul.

La loi Veil, votée dans la confusion que l'on sait, renforce cette convergence de nos crises diverses en jetant le désordre dans les motivations. Une clarification s'impose.

Commençons par les aspects institutionnels. On sait que les institutions obéissent au principe séculaire de l'intérêt général ou du bien commun et ceux qui critiquent l'individualisme devraient le rappeler en notre matière. Or, l'intérêt général exige que soit enrayé le déclin démographique ; tout a été dit sur cette évidence, mais malgré l'appel aux familles à des mesures économiques partielles, à la dignité du couple et de l'enfant, le résultat reste négatif. Parce que la chute de la natalité a sa cause profonde dans les consciences, c'est-à-dire dans le problème moral que l'on donne au mot un sens profane, religieux ou sociologique. Les raisonnements mis en avant pour justifier l'interruption de grossesse sont révélateurs : on joue essentiellement sur l'ambiguité du mot liberté.

Deux opinions s'opposent : celle qui voit dans la loi sur l'avortement un acte purement législatif relevant de la souveraineté des législateurs. Celle qui voit dans cette législation une décision morale et soutient que les lois, si elles relèvent du principe juridique de souveraineté, comportent nécessairement une appréciation de la portée morale des mesures envisagées. Ce clivage s'observe aussi, et fondamentalement, à propos du rôle, ou de la survie, d'une morale aujourd'hui. Nul n'ignore que les contemporains relèguent au dernier rang la théorie morale, situation qu'expliquent l'influence des écrivains "immoralistes" d'hier et d'aujourd'hui, le rôle dés thèses matérialistes et du freudisme, la diffusion de la conception mal interprétée d'ailleurs du nihilisme nietzshéen.

Or, aucune de ces influences n'enlève au jugement moral sa signification et sa fonction : agir, exercer une profession, éduquer, vivre son existence, toutes ces situations ou obligations exigent qu'on se réfère à ce que l'on est forcé d'appeler, n'en déplaise à nos doctrinaires "politiques", à des règles, principes, coutumes et valeurs. Nos contradicteurs voient là des contraintes exercées par un pouvoir de classe, un pouvoir économique, politique ou religieux. Constatons cependant qu'éthnologues, historiens, et penseurs montrent la part manifeste dans les sociétés de morales qui ne sont ni celles de la licence, ni celles de la tyrannie ou de la répression, mais celle du libre vouloir, du dévouement, de la vie quotidienne assumée par des consciences responsables.

II y a plus. Une dialectique nouvelle apparaît, en matière d'avortement, qui vise à lever les scrupules des médecins respectueux de la vie : elle consiste à tirer argument de l'idée même de liberté morale, autrement dit à porter le débat au cœur de l'humanisme chrétien et de la conscience occidentale, raisonnement qui n'est pas sans rappeler l'attitude des "libertins spirituels" dont parle Calvin. De fait, on joue sur l'équivoque d'une liberté mal définie. Certes, la liberté est une notion ambiguë, mais le mérite de la civilisation a été précisément, sous l'impulsion du christianisme, de séparer au cours du temps ce qui est la liberté du chrétien de la liberté païenne et des sectes, des stoïciens, des tenants de la philosophie de la nature qui chacune à leur matière suspendent nos conduites à un matérialisme ou à un fatalisme ou à un pan naturalisme ou à un para-psychisme. Dans tous les cas le jugement moral, qui est le fait d'hommes éclairés par l'esprit, n'existe plus. Le christianisme l'a bien compris qui opposa successivement la nature humaine à la physis, le libre arbitre au déterminisme, les œuvres à la prédestination, la théologie de la liberté à la "théologie de la libération". Le bon sens d'ailleurs ne suffit-il pas à montrer, même si l'on rejette la faute pénale ou le péché, qu'on ale devoir de sauver celui qui est en perdition, même s'il a voulu se suicider, que la drogue, l'alcoolisme ou les perversions sexuelles ne peuvent être fendus au nom de la liberté. II en va de même pour l'avortement qui heurte la loi naturelle, les connaissances biologiques largement acceptées et la dignité de la vie. La liberté n'est ici ni la liberté d'indifférence ni la licence, ni un exercice d'herméneutique.

Nouvelle erreur : cette autre variété du raisonnement dialectique qui consiste à associer à l'ambiguité que l'on veut discerner dans la liberté une ambiguité seconde que l'on installe dans l'idée de vérité. Ne nous a-ton pas assez répété que si tout est relatif, contingent, suspendu à l'intérêt de juger de l'application des lois et des conduites ? A ce nouvel avorteur diabolique, répondons en dénonçant les liaisons d'idées fausses, en constatant que liberté et vérité sont distinctives qui découvre des propriétés successives, voire le sociologue, le moraliste, l'homme religieux qui recueillent les témoignages d'une histoire profane ou divine. S'il n'y avait aucun parallélisme entre liberté et vérité, il deviendrait impossible de concevoir l'existence d'une nature humaine, d'une idée juste, d'un droit humain, d'un homme "vrai" (même au milieu de ses fautes), parce qu'il a été crée pour être sauvé.

Souhaitons que les jeunes, en quête d'une innocence perdue comprennent que ces réflexions se placent au centre des interrogations sur la destinée, aux limites de jeux dialectiques qui ne sont que stratégie. Le débat sur l'avortement, tel que la polémique l'a engagée est - pour notre malheur - un terrain de choix pour observer la crise de la pensée.


Professeur Belin-Milleron

© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, novembre 1979

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