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IMPRIMERLettre à Bruno Frappat du Monde

Un de nos adhérents nous transmet une lettre à M. Bruno Frappat où nous lisons notamment  :

Mais le 1-2 juillet, sous .le titre « La Règle et l'Exception », Le Monde donnait aussi la parole à M. Philippe Engelhard. Puisque, me dites-vous, les lettres que vous publiez sont choisies parmi beaucoup d'autres, on se réjouirait de voir que les partisans de l'avortement en sont réduits à d'aussi misérables sophismes (un peu dissimulés par l'obscurité d'un langage pédant), si on ne devait conclure plus tristement que ces sophismes passent sans doute inaperçus même dans un journal comme le vôtre, et induiront en erreur nos députés tout aussi bien !

« Le degré de conscience, d'encéphalisation », écrit M. Engelhard, « est peut-être un critère de hiérarchie biologique. Mais alors il faut être conséquent : qui du foetus ou du chimpanzé adulte... peut prétendre le mieux à ce degré d'encéphalisation qui lui garantirait le droit absolu à la vie ? ».

Ce monsieur ne voit même pas qu'on ne peut comparer un fœtus humain à un chimpanzé adulte, mais seulement un fœtus d'homme à un fœtus de chimpanzé, et un homme adulte à un chimpanzé adulte. II ne voit pas que c'est le degré possible et ultime de conscience qui doit guider notre choix, et donc que la vie d'un chimpanzé, à n'importe quel stade de son existence, ne peut être mise sur le même plan que celle d'un être humain, à n'importe quel stade de la sienne. II ne voit pas que poser comme critère, non le degré de conscience possible, mais le degré de conscience effectif à un moment donné, c'est, en bonne logique, légitimer la mise à mort de n'importe quel homme, enfant, vieillard, malade, pourvu que l'on constate une baisse sensible de ses facultés intellectuelles. Cette mise à mort serait même beaucoup plus légitime, en cas de baisse irréversible, puisque l'inconscience ou la conscience végétative du fœtus ne sont que provisoires, si on ne le tue pas ! En somme votre correspondant, malgré ses titres universitaires, raisonne exactement comme le Parricide du poème bien connu de Victor Hugo :

« Un jour Kanut, à l'heure où l'assoupissement,
Ferme partout les yeux sous l'obscur firmanent,
Ayant pour seul témoin la nuit, l'aveugle immense,
Vit son père Swéno, vieillard presque en démence,
Qui dormait, sans un garde à ses pieds, sans un chien ;
II le tua, disant : « Lui-môme n'en sait rien. »
Puis il fut un grand roi. »

La différence, c'est qu'on peut douter que nos avorteurs, malgré leurs exploits, deviennent jamais rien de grand !

Même au nom d'une morale purement biologique c'est donc par un raisonnement non seulement stupide, mais dangereux, que l'on assimile le droit d'un homme à la vie dès sa conception au droit à la vie de l'ensemble des êtres vivants, en ajoutant que « le principe posé, par nature, souffre des exceptions ». II n'en souffre pas pour la vie humaine, à moins qu'on n'estime qu'un chimpanzé désiré par ses parents et particulièrement bien doué, ou pourquoi pas un chien, un chat, un perroquet, pourra quelque jour devenir chargé de cours à la faculté de Droit, à l'instar de votre distingué correspondant. Et c'est cependant avec des raisonnements pareils, ou pires, qu'on veut justifier le permis de tuer ! Le principe du moindre mal, qu'invoque M. Engelhard, ne peut donc être valable que s'il y a vraiment à choisir entre la vie de la mère et .la vie de l'enfant. Mais dans ce cas l'avortement, étant réellement médical, est déjà légal.

Vous écrivez, Monsieur, que la revendication des femmes porte non sur le droit d'avorter (puisqu'elles en usent déjà), mais « sur la possibilité de le faire dans des conditions correctes ». Bien qu'on monte en épingle quelques cas tragiques (qui ont tout de même moins de poids que le meurtre représenté par chaque avortement, même "réussi"), vous n'ignorez pas qu'il n'y a pas un avortement sur mille qui tourne mal, même maintenant (voyez à ce sujet le livre de Jean Toulat, p. 13 et 14). Toute la question est de savoir si l'État est dans son rôle en permettant, et même en finançant, un petit crime, sous prétexte que bien des gens le commettent, ou souhaitent pouvoir le commettre plus commodément. II est évident que non, que son rôle véritable est d'aider les personnes hésitantes à ne pas commettre une pareille action. II ne doit donc pas accorder le permis de tuer, mais prendre les mesures sociales propres à diminuer la tentation de tuer. Et les mesures contraceptives à elles seules, sont vaines. Jointes à la permission d'avorter, elles augmentent le nombre d'avortements. En outre, qu'on y prenne garde : nous avons un gouvernement de droite peut-être encore pour vingt ans ou plus ; une fois l'avortement devenu facile il aura beau jeu pour répondre aux femmes : Comment ! Nous voulons bien faire passer votre enfant, hygiéniquement et gratuitement, de vos entrailles à la poubelle, et vous avez l'aplomb de réclamer autre chose, par exemple la possibilité matérielle de mener une vie moins accablante et de l'élever cornvenablement ?

J'ajoute que l'avortement, plus souvent qu'une vraie solution de désespoir, est une décision que la femme prend pour sa commodité personnelle, et que je suis indigné quand je vois déguiser cette préférence en pitié pour la victime tuée qui, si elle avait vécu, n'aurait peut-être pas bénéficié de tout le confort matériel et moral ! A lire les élucubrations de certains, on pourrait croire que ce genre de meurtre est une manifestation touchante du véritable amour maternel ! Quoi de plus répugnant que l'hypocrisie peinturlurant l'égoïsme à la ressemblance de la générosité ? A ces gens-Iià on peut citer Montaigne, qui n'était pourtant ni un fanatique obtus ni un nataliste acharné :

" Et couvroit Tamburlan [Tamerlan] d'une sotte humanité la cruauté fantastique qu'il exerçoit contre les ladres [les lépreux] en faisant mettre à mort autant qu'il en venait à sa connoissance, pour, disait-il, les délivrer de la vie qu'ils vivaient si penible. Car il n'y avoit nul d'eux qui n'eut mieux aymé estre trois fois ladre que de n'estre pas. »
(Essais, livre II, chapitre 37.)

© Laissez-les-Vivre – SOS Futures Mères, décembre 1973

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